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Regard d’un communiste sur le 52ème congrès de la CGT.

lundi 17 juin 2019 par Charles Hoareau (ANC)

Indépendance ne voulant pas dire neutralité ni indifférence, celles et ceux qui veulent changer de société et parmi eux les communistes, n’ont pu être que très attentifs au dernier congrès de la CGT, qu’ils soient eux-mêmes syndiqués ou non. De plus, pour un membre de l’ANC, convaincu de l’importance du lien dialectique qu’il doit y avoir en permanence entre luttes et perspectives politiques, les débats sur les documents et le bilan d’activité de cette organisation syndicale présente sur le terrain des combats contre le capital et le gouvernement à son service, sont forcément riches d’enseignements.

En particulier dans les semaines qui ont précédé le congrès sont apparues des différences dans la CGT dans la conception de la nécessaire convergence des luttes et cela a été visible le 27 avril, journée de manifestation nationale à Paris qui a rassemblé des gilets jaunes et des organisations de la CGT.

Celles et ceux qui espéraient le débat sur ces questions et plus largement sur le bilan en ont été pour leur frais car on ne peut pas dire que ce débat-là ait eu lieu. D’abord le rapport introductif, bien qu’offensif et de ce fait en décalage avec les textes proposés à la discussion préparatoire, ne le portait pas.

Toute la CGT doit-elle reprendre à son compte le mot d’ordre : « Face à l’attaque globale, riposte générale » et aurait donc dû appeler à la manifestation du 27 avril portée par un certain nombre d’organisations CGT ?

Les congressistes ne sauront ni l’opinion de la direction sortante à ce sujet ni ne seront appelés à en débattre. De plus l’organisation des débats, limités dans le temps avec des interventions d’une durée maximale de 5mn, entrecoupés de thèmes abordés où seule la tribune avait la parole parfois sur une demi-journée entière comme ce fut le cas pour l’international, restreignait encore les échanges. Cela ne manqua pas de provoquer des mouvements d’humeur de la salle qui à plusieurs moments scandait : « Le débat, le débat ! ».

Malgré tout le document du congrès fut voté et à y regarder de près le résultat est très révélateur. On peut se dire qu’avec 70% de POUR cela n’est pas énorme, mais quand on analyse plus finement le vote en prenant tous les choix (30% de CONTRE et 15% d’abstention) on s’aperçoit que 45% des délégués n’ont pas approuvé le bilan de la direction confédérale. Au-delà du fait que ce n’est ni flatteur pour l’équipe en place, ni un score habituel pour un tel vote, cela fait apparaître une CGT coupée en deux sur la conception de développement des luttes, des alliances, sur le syndicalisme de classe et ses relations internationales.

Sur ce dernier point, avant le congrès on avait brusquement vu surgir à l’initiative de certains, Bernard Thibault en tête, la question de l’affiliation de la CGT à la CES comme si cette question était devenue subitement l’urgence du jour et un horizon indépassable à ne pas remettre en cause. Pourquoi cette subite affirmation reprise dans plusieurs déclarations publiques d’avant congrès y compris mettant en cause la FSM, problématique qui n’apparaissait pas dans le document soumis à discussion ?
Pour esquiver le débat sur l’activité ?
A cause des 300 amendements reçus sur le sujet ?

Toujours est-il que lorsque le débat est venu sur les questions internationales, la salle a surpris une tribune vite dépassée, en posant la question de manière totalement nouvelle et en levant un tabou posé depuis 1995, celui du nécessaire dialogue de la CGT avec la FSM, confédération internationale présentée à la veille du congrès par Philippe MARTINEZ comme n’ayant pas un « fonctionnement démocratique ».

Pour faire échec à cette volonté des congressistes de travailler avec cette internationale syndicale clairement anti-impérialiste et anticapitaliste, la tribune a fait voter le congrès deux fois au prétexte que les congressistes « n’avaient pas compris l’amendement proposé ». Rien n’y a fait, le 2ème vote a confirmé le 1er en l’amplifiant encore. Donc à l’issue du vote, la CGT est mandatée pour « rechercher constamment l’échange et l’unité » avec aussi la FSM…

La presse a titré que le vote de cet amendement était un « revers pour Martinez » (Le Monde) mais surtout au-delà de cet aspect, le fait marquant de ce congrès, celui qui est le plus porteur d’espoir pour l’avenir et encourageant pour un communiste qui ne court pas après la reconstitution de la « gauche plurielle » qui est au politique ce que la notion de « syndicalisme rassemblé » est au syndicalisme de lutte, c’est que nombre de délégués ont exprimé à travers le vote de cet amendement mais aussi à d’autres moments dans les débats, leur désir de voir la CGT revenir à des positions de classe.

Des positions guidées par l’intérêt et l’unité de la classe ouvrière de notre temps et non par des accords entre directions syndicales prêtes à tant de compromissions. De ce point de vue il est significatif que le nom de Laurent BERGER ait été sifflé et qu’une bonne partie des congressistes a quitté la salle quand est venu parler le représentant de la CES, Luca VISENTINI, le même qui à Vienne quelques jours plus tard, remerciera Jean Claude JUNCKER pour avoir « sauvé l’Europe sociale » (sic !).

La tribune pour se sauver la mise aura beau prétendre que l’élection de BERGER à la présidence de la CES est « symbolique » (justement quel symbole !!) elle ne s’attirera que sifflets, rires et quolibets.

Ce congrès de la CGT a bien montré tout au long des débats que se côtoyaient, voire s’affrontaient quand il s’agissait de la tribune, deux conceptions du syndicalisme. Si le congrès a été houleux par moments à un niveau que personne n’a connu de mémoire, c’est bien parce que cette émergence de volonté d’une CGT plus fidèle à ses racines, porteuses d’une volonté de changement de société, a surpris en premier celles et ceux qui semblent plus dans un syndicalisme institutionnel que révolutionnaire.

Comme souvent en pareil cas c’est le débat démocratique qui en pâtira comme le fit remarquer un délégué qui fut très applaudi : « ce matin vous avez donné la parole à la tribune pendant une heure et demie et maintenant vous voulez laisser parler seulement 10 délégués 3mn chacun : c’est pas ça la CGT ! »

Comme acculée par des congressistes qui ne s’en laissaient pas conter, la tribune a souvent semblé ne rien vouloir entendre mais a été à plusieurs moments agressive, prenant le risque du clivage au détriment du rassemblement que l’on peut attendre et espérer d’une direction d’organisation quelle qu’elle soit.

A l’issue de cette semaine qui a donc vu s’affronter, comme souvent dans son histoire, deux courants de pensée, le courant que l’on peut qualifier de révolutionnaire celui qui ne plaide ni pour le dialogue social, ni pour l’unité des appareils au détriment de l’intérêt des travailleurs, celui qui a dénoncé la mollesse de la direction face aux gilets jaunes, ce courant qui ne peut être cantonné à une seule fédération, union départementale, mais les traverse toutes, ce dernier sort renforcé.

Pour celles et ceux qui pensent comme les communistes, qu’il faut changer totalement de système parce que le capitalisme n’est ni aménageable, ni améliorable, c’est une bonne nouvelle.

   

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