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Coronavirus : l’extrême droite cible les quartiers populaires

mercredi 25 mars 2020 par Lucie Delaporte

En pleine crise sanitaire, l’extrême droite et une partie de la droite s’en prennent aux habitants des « banlieues » et des quartiers populaires, incapables de respecter les règles de confinement. Ou comment renouer avec l’éternel réflexe du bouc émissaire.

Après avoir martelé depuis des semaines que la crise sanitaire que traverse la France – et une grande partie de la planète – ne serait pas arrivée si notre pays faisait respecter ses frontières, les dirigeants du Rassemblement national (RN) ont trouvé un autre bouc émissaire à la propagation actuelle du Covid-19 : les quartiers populaires et leurs habitants indisciplinés.

Depuis quelques jours, l’extrême droite tire à boulets rouges sur les habitants jugés irresponsables des quartiers, incapables de respecter les consignes strictes de confinement. « Il y a toute une série d’endroits où la police a le plus grand mal à faire respecter les règles de confinement », dénonçait le jeudi 19 mars Marine Le Pen, sur France 2.

Sur RTL, la présidente du RN a fustigé « les zones de non-droit » qui se seraient développées dans certains quartiers. Il y a, selon elle, « très clairement des territoires où le confinement n’est pas respecté et particulièrement le soir », a-t-elle énoncé proposant d’instaurer – une vieille marotte de son parti – un couvre-feu pour ces habitants qu’il est temps de mater. « Le couvre-feu ne nuira à personne puisque nous sommes tous confinés. En revanche il nuira aux voleurs, braqueurs et autres racailles qui croient pouvoir continuer leur petit manège en toute impunité », a-t-elle poursuivi.

Originaire de Seine-Saint Denis, Jordan Bardella, qui avait un temps été chargé par le parti lepéniste de rallier la banlieue aux « idées patriotes », tient depuis plusieurs jours le même discours.
« Les Français n’accepteraient pas qu’il puisse y avoir un confinement à géométrie variable. L’unité nationale en cette période passe aussi par là. L’État doit mettre les moyens et donner les ordres pour faire appliquer PARTOUT les mêmes consignes ! », déclare-t-il sur Twitter en relayant un article de l’hebdomadaire Valeurs actuelles intitulé « Barbès, Château Rouge, La Chapelle : ces quartiers où l’on se fiche des règles de confinement ».

Valeurs Actuelles, l’hebdomadaire dirigé par Geoffroy Lejeune, proche de Marion Maréchal, a multiplié les articles narrant des forces de l’ordre en surchauffe face à des habitants insubordonnés. Pour le journal d’extrême droite l’occasion de décrire ces citoyens mi-rebelles mi-idiots déambulant « parmi les rues jonchées de détritus » semblait trop belle.

La rédaction, confinée, collecte donc avec componction les informations sur les incivilités commises dans ces zones de non-droit. Ainsi apprend-on que « des riverains lyonnais se sont indignés de voir certains [commerces – ndlr], comme des kebabs, toujours ouverts ». Et les réseaux sociaux d’extrême droite qui diffusent largement l’article ne bruissent que de l’expression « toujours les mêmes ».

Dans une tribune publiée le 22 mars sur le site Atlantico, Marion Maréchal, en écho, s’indigne qu’« alors que les commentaires ne tarissent pas sur la “légèreté” des promeneurs parisiens face au danger de contagion, rares sont ceux qui dénoncent l’incivisme indécent de la population de nombreux quartiers tels que Barbès, Château Rouge ou La Chapelle où les règles de confinement sont allègrement bafouées ».

« 10 % des amendes dressées mercredi dans le pays le furent en Seine-Saint-Denis, un triste record. Seuls les réseaux sociaux témoignent, une fois de plus, de la désinvolture de ces territoires vis-à-vis des lois de la République et de la solidarité nationale », relève l’ancienne députée frontiste.

« Même le confinement ne parvient pas à éteindre les braises toujours chaudes des banlieues qui profitent de la situation pour organiser des pillages et des guets-apens contre des forces de l’ordre excédées. […] Il faut croire que l’exposition aux LBD est le triste privilège des gilets jaunes. Ces zones de non-droit mettent en péril l’ensemble de la population. Si nous sommes en guerre alors il ne devrait y avoir aucun scrupule à y généraliser le couvre-feu ou à faire intervenir l’armée en appui des forces de l’ordre », conclut-elle.

François de Voyer, président du cercle Audace et l’un des plus proches conseillers de Marion Maréchal, relaie aussi une vidéo de policiers accueillis par des pétards dans une cité de Seine-Saint-Denis avec ce commentaire :
« C’était aujourd’hui, à Noisy le Grand, aux camemberts. J’ai honte du laxisme de notre gouvernement face à ces racailles. Ce sont des zones de non France. Mais ils ne se contentent plus de pourrir leur quartier, c’est tout le pays qu’ils mettent en danger. Qu’on les dresse enfin ! »

Après l’exotisation des « quartiers », l’animalisation de ses habitants… Ou comment l’épidémie de coronavirus permet à l’extrême droite de renouer avec ses métaphores favorites.

Le très médiatique conseiller de Marine Le Pen, Jean Messiha s’agace de son côté qu’« en plein confinement, la racaille tire dans la rue à l’arme de poing », explique-t-il, vidéo non sourcée à l’appui d’un homme tirant en l’air. « Où est donc l’État de droit dont les “progressistes” nous saoulent dès qu’on défend notre identité ? Ah oui il est occupé à dresser des PV à 50 Français enterrant un proche pour non-respect du confinement », ajoute-t-il.

Ce membre du bureau du RN partage sur le réseau le « rap du confinement », dans lequel un homme portant une tenue de sapeur-pompier rend hommage aux hommes en uniformes (« sapeurs-pompiers, policiers, blouses blanches »). « Je n’aime pas les racailles, je le dis haut et fort », chante-t-il. « Je vais pas passer par mille chemins je vais te dire que t’es minable, irresponsable rien dans la tête, comportement haïssable. Tu donnes une mauvaise image du quartier. Tu fais le dur, tu fais le boss, imagine ta mère contaminée, intubée, en détresse respiratoire quand t’agresses la police, les pompiers/ Mais t’es qu’une grosse merde dans l’histoire. »

La fachosphère s’est remplie ces jours-ci de vidéos et de photos montrant « les quartiers » à la fête, se livrant en toute décontraction à divers trafics, à commencer par celui des masques vendus à la sauvette, pendant que les « bons Français » restent sagement chez eux.

L’identitaire Damien Rieu s’en est fait une spécialité. « Certains sont exemptés de confinement. La loi ne s’applique avec sévérité que sur le bon petit Français », assure-t-il dans un post en montrant des photos non sourcées de rassemblements en banlieue.

Du côté de LR, certains, comme Éric Ciotti, n’ont pas hésité à reprendre la thématique des quartiers populaires coupables d’accroître par leur incivilité les risques sanitaires. Dans un entretien au Figaro, publié le 22 mars, le député des Alpes-Maritimes s’émeut que le confinement ne soit pas respecté dans « des quartiers entiers », « par crainte de soulever des émeutes urbaines. Des mesures beaucoup plus coercitives s’imposent. Je demande le déploiement de l’armée dans ces quartiers ».

La menace est sociale autant que sanitaire : « Les tensions montent partout dans les quartiers […]. Certains pourraient profiter de la situation pour se livrer à des pillages ou à des exactions », s’inquiète-t-il estimant que seuls les militaires peuvent désormais protéger les bons Français de ces classes dangereuses.

Maréchal les voilà ... (NDLR)


Voir en ligne : https://www.mediapart.fr/biographie...

   

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