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J’ai regardé, ce jour, le journal télévisé de France 2 de 13 h. À 6 mn 41 s, la présentatrice Marie-Sophie Lacarrau introduisait un sujet : 1. Sur la mortalité en Seine-Saint-Denis.

mardi 7 avril 2020 par Philippe Arnaud

"Dans les derniers chiffres de l’INSEE, on retiendra cette surmortalité particulièrement élevée constatée en Seine-Saint-Denis, plus 63 % entre l’avant-dernière et la dernière semaine de mars, toutes causes confondues, hors foyers identifiés du Covid-19, comme l’est de la France, par exemple. C’est une hausse parmi les plus fortes, et qui interpelle, forcément, dans le département le plus pauvre de France métropolitaine, Claire Colnet, Maurice Alem."

Voix de la journaliste : "C’est l’un des départements où la surmortalité est la plus inquiétante. En Seine-Saint-Denis, plus 63 % de décès, toutes causes confondues en une semaine. C’est l’une des plus fortes hausses devant la Haute-Marne, plus 54 % et le Val-d’Oise, plus 47 %. En tout, 208 personnes sont mortes du Covid-19 en Seine-Saint-Denis en mars. La maire de Bondy, 50 000 habitants, dit n’avoir jamais autant signé de certificats de décès par jour.

La maire de Bondy, Sylvie Thomassin, PS : "On vient de m’en apporter quatre, quatre certificats de décès et donc des permis d’inhumer qui vont suivre. C’est ce que j’avais avant en une semaine, à peu près. "

Voix de Claire Colnet : "Une surmortalité, selon elle, liée à la précarité, dans ce département le plus pauvre de France métropolitaine.

La maire de Bondy : "Beaucoup de logements sociaux, souvent trop petits, et donc des difficultés à ne pas se se croiser dans la maison quand on est deux à trois dans une chambre, évidemment que la promiscuité en rajoute."

Voix de Claire Colnet : "Autre explication, selon les autorités, les règles du confinement ont mis quelques jours avant d’être respectées, comme c’est le cas désormais à proximité de ce marché, à Aubervilliers. Surtout, de nombreux habitants de Seine-Saint-Denis ont des métiers en première ligne face au virus : aides-soignants, caissiers, infirmiers ou livreurs. Selon le président du Conseil départemental, le système de santé serait aussi sous-doté, face à une telle épidémie."

Stéphane Troussel, président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis : "La Seine-Saint-Denis est un désert médical, avec un nombre de généralistes ou de spécialistes bien moins nombreux que dans le reste du territoire national, au point que la prévention, le recours aux soins sont plus difficiles que dans le reste du territoire".

Voix de Claire Colnet : "La Seine-Saint-Denis compte trois fois moins de lits de réanimation que le département voisin de Paris."

Remarque 1. J’ai graissé les deux extraits ("qui interpelle" et "selon elle") qui disent à demi-mot (pour ne pas effaroucher les téléspectateurs "qui-ne-font-pas-de-politique"...), ce qu’est la réalité. Dans cette surmortalité, la pandémie du Covid-19 n’est en effet qu’une cause seconde, conjoncturelle, qui s’ajoute à une cause première, structurelle, la pauvreté. La pandémie agit comme un révélateur sur cette pauvreté et en démultiplie les aspects funestes (parce que les gens sont déjà fragiles, si ce n’est fragilisés).

Remarque 2. Cette remarque rejoint ce que je disais dans ma chronique du 23 janvier 2006, où je m’indignais que, lorsque la température descend en dessous de zéro, les journalistes disent que des sans-abri "meurent de froid". Et je rappelais à ce propos que les malheureux qui dorment dans la rue "ne meurent pas de froid" ! Ils meurent de l’indifférence, ils meurent de l’égoïsme de la société, ils meurent du manque de solidarité, de compassion, d’empathie, de fraternité.
Pourquoi, d’ailleurs, mourraient-ils davantage lorsque la température est à - 1° C que lorsqu’elle est à + 1° C ? Ou pourquoi mourraient-ils davantage en hiver qu’en été, alors que, notamment par temps de canicule, les conditions atmosphériques sont tout aussi éprouvantes ?

Remarque 3. La remarque de France 2, média de grande diffusion, rejoint ainsi l’article de Michael Marmot du Monde diplomatique de ce mois ("Austérité, la grande faucheuse"), où l’auteur dit, en conclusion, que "Les inégalités de santé pourraient être évitées et fortement réduites, dans la mesure où elles découlent d’inégalités sociales elles-mêmes évitables".

Remarque 4. Un parallèle peut d’ailleurs être dressé avec cet autre phénomène social qu’est la prison, où il s’avère que les gens emprisonnés - notamment aux États-Unis - ne le sont peut-être pas tant, conjoncturellement, parce qu’ils ont commis des crimes ou des délits que parce que, structurellement, ils sont pauvres, chômeurs, illettrés, immigrants, c’est-à-dire au ban de la société.
L’incarcération apparaît ainsi comme le traitement social de la misère [comme le disait notamment Loïc Wacquant dans Le Monde diplomatique. Et peut-être, pour en sortir, faudrait-il consentir à tarir le "pognon de dingue" (pour reprendre la remarque vulgaire d’un président de la République, dont on oubliera le nom...) "pognon de dingue" qui afflue dans les coffres des riches (par suppression de l’ISF, par abaissement, depuis des années, du taux marginal d’impôt sur le revenu, par exonération de cotisations sociales...).

Remarque 5. J’ai aussi graissé les mots "en première ligne", qui sonnent comme un rappel (discret ?) des métaphores guerrières d’Emmanuel Macron, pour rappeler que, lui, en première ligne, il n’y est pas... Comme ne fut jamais en première ligne George Walker Bush, second président de ce nom, qui, à l’époque de la guerre du Vietnam, fit son service militaire... dans le ciel du Texas.
Et pas davantage Donald Trump, qui obtint quatre reports d’incorporation à l’époque de la guerre du Vietnam, puis fut "providentiellement" réformé en 1968.
Ni John Bolton, si prompt à prôner la guerre contre l’Iran ou la Corée du Nord et qui, à l’époque de la guerre du Vietnam, fit des pieds et des mains pour ne pas aller combattre dans les rizières...

2. Sur la générosité envers les hôpitaux.

- Un peu plus tard, le sujet démarre ainsi : "Dans certains supermarchés, au moment du passage en caisse, par carte bancaire, le client peut choisir de donner quelques centimes aux hôpitaux de Paris, mais aussi pour financer la recherche sur le Covid-19. Une démarche naturelle pour certains.

Une cliente : "J’ai donné en faveur de l’APHP (Hôpitaux de Paris], je ne donne pas systématiquement, mais là c’est la deuxième fois que je viens faire mes courses et c’est la deuxième fois qu’on me le propose. Donc j’ai arrondi au chiffre rond... Autre cliente : "J’aurais aimé faire plus, mais, bien évidemment, j’ai appuyé sur la petite coche verte pour dire que je participais."

Voix de la journaliste : "Pour faire ce geste, il suffit donc d’appuyer sur la touche verte du terminal lors du paiement. 100 % des dons sont ensuite redistribués. Ce micro-don est aussi possible pour les salariés de certaines entreprises. Ce groupe, par exemple [Ici une vue d’un immeuble de L’Oréal, avec son nom au-dessus de l’entrée] propose la démarche à ses collaborateurs depuis deux ans. Cette fois, l’arrondi sur salaire est destiné aux hôpitaux. Pour cette salariée du groupe, quelques centimes seront prélevés sur son compte à la fin du mois."

Vue d’une salariée : "On est confiné, donc on a la sensation que nos moyens sont assez limités pour participer. Donc cet arrondi sur salaire, finalement, a été une solution assez idéale pour montrer mon soutien."

Voix de la journaliste : "Des cagnottes aussi ont été organisées pour mettre en place des paniers solidaires. Avec la collaboration des supermarchés. Chaque matin, depuis plus d’une semaine, Marianne Valny, d’habitude en caisse, fait le tour des rayons pour remplir ses paniers".

Vue de la caissière : "Dans les paniers, nous avons des bananes, on a des fruits, des légumes, on a des boîtes de conserve, haricots verts..."

Voix de la journaliste : "A l’intérieur, une quarantaine de produits de première nécessité. D’une valeur de 30 euros, ces paniers seront distribués par la Croix-Rouge aux plus démunis mais aussi aux soignants."

Remarque 1. Cette opération rappelle étrangement - mais ce n’est sans doute qu’une coïncidence...- l’opération "Pièces jaunes" de Bernadette Chirac, puisque les sommes qui marquent la différence entre l’arrondi à l’euro supérieur et l’arrondi à l’euro inférieur sont représentées précisément par des pièces de 10, 20 et 50 centimes, c’est-à-dire des "pièces jaunes". C’est-à-dire une opération où les riches font aider les pauvres par leurs concitoyens à peine moins pauvres qu’eux.

Il s’agit là d’une opération de charité, de dames patronnesses du XIXe siècle, gluante de paternalisme. "Tenez, mon ami, voici une veste que je n’ai portée que lors de mon entrée à l’Élysée, et une robe de Brigitte datant de cinq ans, mais comme neuve. Et cinq euros pour acheter des bonbons à vos enfants. Mais vous n’irez pas les boire, n’est-ce pas ?".

Remarque 2. Ce reportage, qui vise à nous faire déborder de reconnaissance envers la grande distribution "omet" de signaler qu’en 2013, les cinq enseignes de la grande distribution en France (Leclerc, Carrefour, Système U, Auchan, Intermarché) avaient été épinglées pour une fraude fiscale, faisant perdre de 2 à 4 milliards d’euros par an aux caisses de l’État.

Deux à quatre milliards, c’est autre chose que des pièces jaunes... Et omet de signaler que la famille Mulliez, propriétaire (entre autres) d’Auchan, mais aussi de Décathlon, de Midas, de La Redoute, de Leroy-Merlin... est championne de l’exil fiscal. Tout comme l’héritière de L’Oréal, avec sa mère, Liliane Bettencourt, qui avaient fraudé le fisc.

Remarque 3. La diffusion de ce reportage est inquiétante par ce qu’elle ne dit pas. Et ce qu’elle ne dit pas, on le devine par le silence assourdissant de l’exécutif sur la possibilité de rétablir l’ISF à la fin de la pandémie (mais pas au taux ridicule de 1,5 %...) ou de remonter le taux marginal d’impôt sur le revenu. Ou d’entreprendre une démarche conjointe, avec tous les pays de l’OCDE, pour siphonner jusqu’au dernier centime l’argent déposé dans les paradis fiscaux. Argent qui, je le rappelle, est par essence de l’argent malhonnête...

Je vous saurais gré de vos remarques, précisions, rectifications et critiques.

   

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