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Vietnam, Corée du Sud : comment ont-ils réussi à dompter le Covid-19 ?

mercredi 29 avril 2020 par RFI / Blog Mediapart

Au Vietnam, pays frontalier de la Chine de presque 100 millions d’habitants, aucun décès lié au Covid-19 n’a été constaté et moins de 300 cas de contaminations ont été relevés. Un bilan jugé crédible par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui a même loué le pays pour sa transparence. (RFI/Frédéric Noir)

Le rapport que vous pouvez consulter dans ce billet est le récit du vécu de l’épidémie en Corée du Sud. À partir de documents de première main et de témoignages recueillis sur place, il propose une analyse approfondie des aspects épidémiologiques, juridiques et médicaux de lutte contre Covid-19, ainsi que des perspectives de « sortie ». Par François Amblard, physicien et biologiste, Directeur de recherche au CNRS. (Blog Médiapart).

Coronavirus : comment le Vietnam a réussi à contenir l’épidémie

Comme le Vietnam n’avait pas les moyens de se lancer dans des tests de masse, comme a pu le faire la Corée du Sud, il s’est lancé dans une stratégie que certains ont qualifié de « low cost », c’est-à-dire que le pays s’est donné comme priorité d’isoler les malades et de rechercher toutes les personnes avec lesquelles ces malades ont pu entrer en contact, de façon directe ou indirecte.

En tout, près de 100 000 personnes ont été placées en quarantaine. C’est également le cas de tous les voyageurs internationaux en provenance de l’étranger, placés immédiatement en quarantaine quatorze jours, souvent dans des bâtiments militaires à l’extérieur des villes. J’ai moi-même été placé en quarantaine chez moi, parce que je revenais de Malaisie et on a installé une caméra devant ma porte pour être sûr que je ne sorte pas.

Isolement et recherche de tous les contacts

À côté de cela, le gouvernement n’a pas hésité à placer des quartiers entiers en isolement. Par exemple, une commune entière de 10 000 habitants au nord de Hanoi a été totalement coupée du monde pendant trois semaines, parce qu’un cas positif y avait été détecté. De même, 1 600 personnes d’un même quartier ont été placées en isolement pendant vingt-huit jours dans le delta du Mékong à cause d’une seule personne testée positive.

En parallèle, le 1er avril, le gouvernement a instauré un plan de confinement de la population avec notamment l’interdiction des rassemblements et la forte « recommandation » de ne pas sortir de chez soi, sauf motif essentiel. Sur ce dernier point, il faut bien reconnaître que de nombreux Vietnamiens n’ont pas respecté la consigne.

Dans mon quartier, en banlieue de Ho-Chi-Minh Ville ou Saïgon, de nombreuses personnes ont continué leurs activités comme si de rien n’était. En revanche, dans leur très grande majorité, les gens portent toujours le masque en public. Et de nombreux commerces contrôlent à l’entrée la température des clients. Tout comme la police, qui a instauré des check-points à l’entrée des grandes villes.

« Offensive générale »

Le Premier ministre vietnamien a qualifié les efforts du Vietnam d’« offensive générale », faisant référence à l’offensive du Têt de 1968. Le gouvernement a pris des mesures très tôt pour limiter la propagation du virus. Dès la mi-janvier, les autorités ont réuni un comité de gestion de crise avec des médecins et des scientifiques pour contrer le virus. Et ils ont pris rapidement des mesures très fortes.

Ils ont, par exemple, tout de suite interdit la réouverture des écoles, ils ont réquisitionné des médecins retraités, ils ont augmenté leurs capacités de production en masques. Il faut dire que le Vietnam a bénéficié de son expérience de 2003 quand il était déjà parvenu, à l’époque, à étouffer l’épidémie de Sras.

Hanoï a également décidé de suspendre tous les vols entre le Vietnam et la Chine dès le 1er février avant de restreindre tous les vols internationaux. Et surtout, le pays a décidé de fermer sa frontière terrestre avec la Chine, ce qui était vraiment une décision très forte quand on connaît la dépendance de l’économie vietnamienne à la Chine, qui est son premier partenaire commercial.

Aujourd’hui, le pays communiste tire une certaine fierté de son bilan qui légitime des méthodes parfois intrusives, mais largement approuvées par la population. En attendant, les écoles commencent à rouvrir dans certaines provinces même si la prudence reste de mise.


Comment la démocratie coréenne a-t-elle dompté Covid-19 ?

La Corée du Sud a endigué Covid-19 en plaçant son Korean Center for Disease Control (KCDC) au cœur de la réponse sanitaire de crise. Par la loi, le KCDC reçoit la mission de diriger la totalité des opérations sanitaires, et jouit pour cela de pouvoirs exécutifs d’exception, avec autorité sur la police et la justice pour les besoins de sa mission. L’ensemble des actions contre la pandémie (dépistage, traçage, isolement sanitaire hospitalisation, autorisations et agréments d’urgence…), mais aussi tous les outils administratifs et juridiques nécessaires, sont ainsi placés sous une direction unique.

Cette remarquable cohésion a permis une réponse très rapide et vigoureuse. Enfin, placé actuellement sous la direction d’une professeure de médecine forte d’avoir lutté contre l’épidémie précédente, le KCDC jouit d’une autorité respectée de tous, car fondée sur la connaissance scientifique, l’expérience professionnelle, des actions et une communication quotidienne transparente.

Étant perçu comme un organe politiquement indépendant, son action est restée hors du champ d’une critique politique et partisane vivace. La mise en œuvre, aussi rapide que massive, de la doctrine désormais bien connue de dépistage-traçage-isolement a été rendue possible par ce contexte juridique et politique original, sans oublier la mobilisation des industriels de la santé pour la conception des tests, approuvés sur le marché le 4 février, soit 14 jours avant l’explosion coréenne de Covid-19.

Le traçage des personnes ne concerne que les individus avérés porteurs ; il est strictement rétrospectif et ne concerne que les deux semaines précédant le test.

En dehors du suivi sanitaire téléphonique biquotidien, sans GPS, de toute personne positive pendant deux semaines d’isolement, il n’existe aucune procédure de traçage, ni particulière, ni générale. La base de données, hébergée en dehors du gouvernement, est soumise à un strict contrôle d’accès ; toute demande d’information est enregistrée et elle sera détruite à la fin de la crise Covid-19.

Le 15 avril 2020, jour d’élections législatives sous haute protection sanitaire, aucune levée des mesures en vigueur n’a été annoncée. Le système scolaire est fermé en totalité, et les cours passent graduellement en ligne ou la télévision. Aucune ré-ouverture d’école n’est à l’ordre du jour, et des dizaines de milliers de tablettes numériques ont été données aux enfants de familles n’ayant pas d’accès à internet.

Aussi longtemps que nous n’aurons ni vaccin ni thérapie, le KCDC conservera son rôle de pilote et ses pouvoirs d’exception. Pour préparer cette période d’attente, le gouvernement coréen collabore avec la société civile et le monde de l’éducation afin d’imaginer un modus vivendi consensuel temporaire plus acceptable, mais sans compromis avec la doctrine anti-Covid-19.

Le texte que vous pouvez consulter dans le pdf ci-dessous est le récit du vécu de l’épidémie en Corée du Sud. À partir de documents de première main et de témoignages recueillis sur place, il propose une analyse approfondie des aspects épidémiologiques, juridiques et médicaux de lutte contre Covid-19, ainsi que des perspectives de « sortie ». L’auteur est un chercheur français physicien et biologiste qui, après ses travaux à l’Institut Curie (Paris), poursuit ses recherches depuis près de cinq ans dans une université publique coréenne.

Pour consulter l’intégralité du rapport, cliquez sur ce lien :
Covid en Coree du Sud – Rapport Amblard– partie I (pdf, 6.1 MB)

Introduction du rapport :

La Corée du Sud, une des nations les plus pauvres du globe il y 60 ans, s’est débarrassée du joug de la dictature juste avant le début de ce siècle pour construire une démocratie très vivante, et elle nous donne aujourd’hui la preuve qu’il est possible de protéger la santé des citoyens des ravages d’une pandémie dévastatrice.

Sans rien mettre entre parenthèses du jeu démocratique, sans rien limiter des libertés individuelles pour 99,98% de la population, sans jamais fermer les frontières, le gouvernement et les 51 millions de Coréens ont réussi en quatre semaines à dompter le flux quotidien de personnes nouvellement infectées.

Le nombre des victimes de Covid-19 déplorées chaque jour n’a jamais dépassé la dizaine. Le contraste saisissant avec les ravages de la pandémie dans la plupart des pays riches en Occident devrait inspirer à notre nation, la France, une sincère et profonde humilité politique, mais surtout réveiller impérieusement en nous une curiosité indispensable.

Nous savons désormais tous que la première bataille contre le virus a été remportée en Corée grâce à une doctrine très rigoureuse : dépistage massif, traçage des individus porteurs du virus, et isolement.

Avant de comprendre pourquoi nous avons failli, il est très urgent de comprendre ce que signifient dans la pratique ces mots clés, tant ils résonnent aujourd‘hui comme des évidences. Vivant en Corée, mon devoir de chercher à comprendre a pris la forme d’un rapport dont voici la première des deux parties.

Dans les pages qui suivent, j’analyse la « solution » coréenne à l’aune de plusieurs questions, qui en France sont aujourd’hui critiques :

– Comment briser les chaînes de contamination par le traçage rigoureux des contacts contaminants ?
– Quelles garanties juridiques face à l’intrusion dans la vie privée, et comment utiliser les données récoltées ?
– Comment soigner dans l’urgence, sans certitude scientifiquement établie sur les outils thérapeutiques ?
– Comment élaborer au plus vite un consensus thérapeutique acceptable ?
– Comment « sortir » du confinement avec une sécurité sanitaire maximale ?
– Comment rendre cette sortie consensuelle ?

Il est extrêmement probable que les solutions coréennes auraient des effets très positifs en France, mais elles posent un problème d’échelle, car le nombre de personnes infectées est probablement cent fois supérieur chez nous. Heureusement, cela n’est pas encore le cas Outre-mer, où ces solutions pourraient contribuer à contenir l’épidémie, car il n’est pas trop tard. Elles devraient donc y être transposées sans attendre. Pour la métropole, malgré l’ampleur considérable de la pandémie, ces solutions sont qualitativement très utiles, et devraient guider nos actions dès demain matin.

Beaucoup d’idées fausses sur la Corée, mêlées à un complexe de supériorité alimenté par l’ignorance, conduisent certains à penser que les solutions coréennes ne peuvent pas s’appliquer chez nous du fait de trop grandes différences entre les deux pays.

Dans la seconde partie, à paraître prochainement, je répondrai à cette objection par l’analyse des points suivants : bases culturelles, politiques et épistémologiques de la confiance mutuelle entre l’État et la population ; organisation juridique et politique de la réponse au désastre pandémique ; planification stratégique et entretien de la veille sanitaire ; stratégie industrielle et mobilisation extrêmement rapide des industries de la santé ; logistique des tests et des masques ; maintien d’infrastructures sanitaires de haut niveau ; enfin articulation entre les enjeux sanitaires, économiques et diplomatiques.

Sommaire

Introduction

1. Traçage rétrospectif et isolement des porteurs de virus
1.1 Dispositif d’enquête individuelle
1.2 Stockage des données et garanties juridiques
1.3 Mesures découlant du traçage
1.4 Diffusion des données de traçage
1.5 Résistances et adhésion

2. Réponse médicale : isoler, protéger, et soigner
2.1 Stades cliniques : définition et orientation initiale
2.2 Recommandations thérapeutiques, chloroquinine, essais informels
2.3 Une hôtellerie d’isolement pour contenir Covid-19
2.4 Prise en charge et obligations des contacts du patient Covid+
2.5 Isolement systématique de tout voyageur entrant dans le territoire
2.6 Critères de sortie ou de levée d’isolement, règles ultérieures
2.7 Protection des personnes âgées
2.8 Y a-t-il eu saturation des hôpitaux, manque de tests ou de masques ?

3. Essais thérapeutiques en cours
3.1 Essai formel hydroxychloroquinine
3.2 L’Institut Pasteur de Séoul : ‘drug repositionning’ avec le ciclesonide (Alvesco)
3.3 Autres essais cliniques

4. Que faire une fois la courbe infléchie ?
4.1 Le bilan de Covid-19 en Corée du Sud
4.2 La vie quotidienne aujourd’hui : liberté et veille
4.3 Élaboration consensuelle d’un modus vivendi durable

Conclusion

Pour consulter l’intégralité du rapport, cliquez sur ce lien :
Covid en Coree du Sud – Rapport Amblard– partie I (pdf, 6.1 MB)


Voir en ligne : https://www.les-crises.fr/coronavir...

   

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