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L’Islamophobie, une passion à la française. (Suite et Fin)

jeudi 18 novembre 2021 par Badia Benjelloun (ANC)

La notion de l’islamophobie, reconnue comme un préjugé envers l’Islam, est ancienne. Cette prévention a été identifiée, il faut le préciser d’emblée, chez l’Occidental envers le musulman qui résiste à la conquête armée. Dans son acception actuelle, le terme réapparaît dans les années quatre-vingt du XXème siècle. Nous admettons ici qu’il désigne non pas une aversion ou une critique de l’Islam mais l’ensemble des faits sociaux où des personnes de confession musulmane ou simplement supposées l’être qui subissent des discriminations, de l’humiliation, des brimades et de la violence.

Les transformations du capitalisme, ingrédient nécessaire.

L’instauration du « néo-libéralisme » à la fin des années soixante-dix avec Thatcher et Reagan, poursuivie scrupuleusement par Blair et Clinton, répondait à une nouvelle configuration du capitalisme où de façon outrageusement évidente, les multinationales ont atteint des tailles telles qu’elles disposent de ressources budgétaires supérieures à bien des États.

L’expansion sans précédent des activités bancaires, privatisées et de plus en plus concentrées, a accompagné cette mutation. Les banques sont ‘déspécialisées’, elles assurent à la fois le rôle d’organismes de dépôt de l’épargne, de distributeur du crédit et celui de banque d’investissement (et de spéculation).

Le deuxième trait du néo-libéralisme consiste en l’importation d’une main-d’œuvre non qualifiée émigrée, analphabète et peu susceptible de se syndiquer. Les grèves de 1983 en France sont venues justement contredire cette anticipation par le patronat.
Ce même phénomène a lieu aux Usa, l’arrivée incessante des Mexicains constitue une armée de réserve de travailleurs ‘illégaux’, ‘sans documents’.
Un peu plus tard, pas moins de 4 millions de Polonais (suivis ensuite par des Roumains, des Ukrainiens et des Baltes) ont quitté leur pays, hémorragie qui a notablement modifié la démographie et le mode de vie, pour rejoindre le Royaume-Uni.

Ces migrations humaines, véritable transfert de populations, n’ont pu avoir lieu qu’en raison de la dévastation économique des pays du ‘Sud’ et de l’’Est’, en particulier par le système de la Dette, souvent odieuse, la prédation de leurs richesses et la destruction de leur tissu agricole et industriel.

L’appareil de production allait connaître une fragmentation de la production. L’élimination des taxes douanières, la facilitation de la communication en temps réel par les nouvelles technologies et l’adaptation du transport maritime a permis de morceler en plusieurs segments répartis sur de nombreux pays ce qui se construisait et s’assemblait autrefois sur une même chaîne en un lieu unique.

Délocaliser et sous-traiter sont devenus les maîtres-mots du nouveau code managérial. La multiplication des sous-traitants eux-mêmes employant des CDD, des intérimaires, et l’éclatement de la production en des sites éloignés les uns des autres a donné l’illusion que la classe ouvrière avait disparu.

En France, on recensait huit millions d’ouvriers en 1970, il y en a aujourd’hui 6,7 millions.
La classe ouvrière est toujours présente mais l’extrême division du travail et sa dissémination territoriale ont affaibli sa ‘puissance d’agir’. On se syndicalise moins dans de petites unités et il est plus dangereux d’y militer car le chômage structurel imposé est un frein à s’exposer au danger de se faire licencier en des temps où la répression et la criminalisation de l’action revendicative s’est banalisée.

Les multinationales pratiquent alors sans vergogne vis-à-vis des élus impotents car ils ont entériné le principe du libre-échange, le chantage à l’emploi tellement est aisée la fermeture d’un site et sa transplantation du jour au lendemain là où l’activité est défiscalisée et les contraintes salariales et environnementales plus favorables.

L’industrie des médias a imposé son discours et son idéologie comme l’instance éducative primordiale. Elle instruit du plus petit au plus grand. Hollywood et ses succédanés sous forme de feuilletons télévisuels ont déployé leur force de frappe persuasive sur toute la planète.
Tout le monde ou presque, du moins en Occident connaît l’univers impitoyable de Dallas, tout le monde saura que le Musulman est un terroriste, qu’il opprime la femme traitée comme inférieure, qu’il ne connaît que la violence et qu’il est réfractaire aux ‘valeurs’ de la démocratie et de liberté.

Péripéties, feuilleton à la française

1989 a été marqué en France par la commémoration bruyante du bicentenaire de la Révolution française organisée sous le gouvernement social-démocrate de François Mitterrand, l’homme à la francisque et adversaire acharné de l’indépendance de l’Algérie en 1954, responsable en tant que ministre de l’exécution de nombre de patriotes résistants.

Ce fut aussi l’année au cours de laquelle Khomeini a émis une fatwa, c’est-à-dire un avis émanant de plusieurs théologiens, qui condamne l’écrivain britannique Salmane Rushdie, né dans une famille musulmane indienne, pour blasphème et apostasie. La publication de son roman touffu entremêlant trame onirique et narration réaliste avait choqué d’abord les musulmans indo-pakistanais au Royaume-Uni qui ont manifesté et brûlé des milliers d’exemplaires de son livre. Le Prophète de l’Islam y demandait à l’ange Gabriel son intercession pour que figurassent auprès d’Allah trois divinités féminines appartenant au Panthéon de la Mecque.
Un épisode du roman attribuait à des prostituées dans une maison close les prénoms des femmes du Prophète. L’Iran pansait ses plaies d’une guerre de huit ans que lui avait infligée l’Occident par l’intermédiaire de Saddam Hussein et se voulait être le champion de la cause des musulmans.

L’affaire Rushdie avait pris une dimension planétaire, mettant en scène un Occident laïc et libéral-à défaut d’être libérateur- et un Orient obscurantiste, intolérant et refusant toute critique de sa religion, fût-elle sous la forme d’une dérision. Dans le même temps, à Peshawar, au Pakistan, un foyer de théologie qui faisait essaimer une interprétation littéraliste, rigoriste et inédite du Coran, créé par le couple des Ibn Saoud et de la CIA, était encouragé.

Quelques mois plus tard, à la rentrée scolaire d’octobre 1989, éclate l’affaire du foulard. Le principal d’un collège de Creil, appartenant politiquement à l’opposition de droite et porté par des ambitions électoralistes, refuse l’entrée de l’établissement à trois jeunes élèves portant un fichu sur la tête. Plus de trente ans après, la France est encore engluée dans un débat sans fin les ‘valeurs républicaines’ de la laïcité.

Elle n’a cessé de légiférer sur le port de signes ‘ostensibles de la religion’, incompatibles selon elle avec la nécessaire uniformité du comportement vestimentaire de ses citoyennes. L’hystérie médiatique qui a conditionné et perpétué l’affaire serait incompréhensible si l’on ignore l’influence des commanditaires de l’Otan sur cette question.
Ils attisent d’une part le rejet de l’Islam qui serait une menace civilisationnelle contre l’Occident et, parallèlement, invitent à l’ambassade des Usa des figures susceptibles de représenter les ostracisées tout en finançant par l’entremise de la fondation de Georges Soros quelques officines indigénistes.

À l’affaire des fichus a succédé la crispation autour du sort d’à peine quelques milliers de femmes portant le niqab ou voile intégral sur une population de plus de 65 millions. Certes exploitée depuis des forces externes, elle met en jeu tous les ressorts historiques profonds énumérés jusqu’ici avec un enjeu de plus.

La création d’un ministère de l’Identité nationale après les élections présidentielles de 2006 (financées de façon frauduleuse par l’équipe gagnante) répond au trouble profond dû à la disparition de la souveraineté de la France sous les instances qui décident de son budget et de la politique étrangère de l’Union européenne- autre nom du patronat allemand.
Le « Non » du peuple français au traité constitutionnel de l’UE a été foulé aux pieds pendant que s’engageaient des mois durant de faux débats sur une identité mise en lambeaux par une mondialisation arasant toute singularité.

Au cours de cette bataille idéologique, les micro-luttes des ‘indigénistes’ se sont déployées et ont trouvé des relais conséquents dans les médias. Leur exposition médiatique était et reste toujours inversement proportionnelle à leur force militante. Elles dénonçaient un effet secondaire et presque fortuit du capitalisme mondialisé, un certain racisme lié aux migrations des populations sous la pression des guerres impérialistes, des restructurations imposées par le FMI et déjà des désertifications de territoires entiers.

Mettre en avant exclusivement la lutte contre le racisme, vécu sous la forme d’exclusion du marché de l’emploi et de contrôles au faciès, c’est aussi escamoter son fondement économique réel, la mainmise des multinationales logées en France sur toute l’Afrique francophone.
Construire un TGV inutile au Maroc entre Tanger et Casablanca, c’est exproprier des milliers de familles et les arracher de leur occupation de paysans produisant de l’agriculture vivrière pour les jeter dans des bidonvilles à partir desquels ils seront candidats à l’émigration. Tout en endettant le pays qui l’est déjà fortement.

Les ‘indigénistes’ malgré un niveau de vie plus faible que la moyenne nationale tirent néanmoins profit de l’exploitation des pays périphériques satellites par le Centre. Ils paient peu cher l’électricité fournie par les centrales nucléaires françaises alimentées par un uranium extrait dans des conditions épouvantables par des enfants au Niger.
Objectivement, ils ne peuvent centrer leurs analyses sur les mécanismes réels qui ont conduit à la construction idéologique d’un faux ennemi de l’intérieur.

Jamais l’immigré musulman ostracisé comme le ‘noir racisé’ ne constituera une classe réellement dangereuse pour la domination capitaliste. Il sera utilisé par l’activation médiatique d’affects antireligieux et surtout islamophobes pour cimenter une opinion mobilisée contre lui. De façon temporaire car bientôt le capitalisme débridé génère de telles inégalités et de telles détresses sociales que le camouflage des ravages économiques derrière un Islam convoqué comme perturbateur essentiel ne résistera pas à la réalité.

La destruction de la Libye puis de la Syrie par l’OTAN

Le plus américain des Présidents français a sans discuter répondu à l’appel de l’OTAN, organisation à laquelle s’était récemment soumise la France par son intégration à son commandement militaire, en détruisant la Libye et en assassinant son chef d’État en 2011. Des bandes de mercenaires ‘islamistes’ d’abord amenées là par le Qatar et l’Arabie des Séoud ont bourgeonné dans toute l’Afrique limitrophe et au-delà.
Un réseau complexe de surgeons de l’armée islamique du salut algérienne et d’Al Qaïda, alimentés en armes depuis de nombreuses sources occidentales, s’est tissé en Afrique sub-sahélienne. L’instabilité générée par l’intervention française et britannique a fini par induire une intervention militaire française au Mali en 2013, qui dure encore à cette date des premiers mois de 2021.

La raison réelle de ces opérations, outre de dissoudre toute velléité d’indépendance monétaire/stratégique de l’Afrique, est une lutte contre la présence d’autres acteurs sur le continent, Chine, Turquie et Russie. De surcroît, les intentions de Washington, assez perceptibles, sont de chasser la France de son pré-carré traditionnel toléré pendant la guerre froide.

Dans la foulée de la mise au pas des révolutions du printemps arabe, la France collabore avec le Pentagone pour favoriser la dislocation de la République arabe syrienne sous les coups de boutoir de milices rebelles et de mercenaires avec la complicité d’une Turquie appâtée par une nouvelle annexion d’un morceau du territoire syrien. Le chef de l’exécutif dont s’est ensuite dotée la France ne s’est pas montré moins atlantiste que son prédécesseur, n’a-t-il pas refusé de livrer des frégates commandées et payées par la fédération de Russie sur ordre de Washington ?

La destruction par les nations impérialistes occidentales de la Libye suivie de celle de la Syrie aura sur eux en retour des effets boomerang. Ils n’auront pas facilité le recrutement de certains de leurs ressortissants musulmans, la plupart récemment convertis, pour aller combattre l’armée régulière syrienne au nom d’un certain Djihad sans en ressentir de conséquences.

C’est tout le sens des attentats perpétrés en France en 2015.

La tuerie des frères Kouachi en janvier 2015 au siège du journal Charlie Hebdo autrefois impertinent envers les puissants mais rangé depuis longtemps du côté des forces impérialistes appartient à une séquence particulière.

L’œuvre des néoconservateurs sionistes étasuniens y est très apparente. C’est Daniel Pipes qui avait instruit Flemming Rose, rédacteur des pages culturelles du journal conservateur Jyllands-Posten afin qu’il y fasse représenter le prophète de l’Islam avec une bombe sur la tête. En l’espèce, un tel dessin n’est pas une critique d’une religion ou d’une idéologie mais une accusation des Musulmans caractérisés par métonymie comme des terroristes.

Les néoconservateurs ont ainsi déclenché en 2005 l’effet escompté, une inflammation des masses musulmanes offensées par cette provocation d’une ampleur internationale. L’ordre de reproduire les images popularisant la représentation des Musulmans en tant que terroristes par essence religieuse fut exécutée par Charlie Hebdo faisant se réaliser selon une dialectique diabolique la théorie des néoconservateurs sionistes.

Des attentats qui ont frappé de nouveau la France en novembre de la même année. Ils émanent des groupes ‘contre-insurrectionnels’ en Syrie créés par les nations satellites des Usa où figure en bonne place la France, nourris d’une idéologie absurde et rétrograde se réclamant néanmoins de l’Islam.

L’usurpation de la qualification islamique a un double intérêt localement. Requérir l’assentiment de populations lésées par les réformes, même si elles étaient encore timides en vue d’un libre-échange et ternir à jamais l’option d’un courant politique musulman.
Au niveau international, elle autorise plus que jamais l’identification entre Islam et Terrorisme, dix ans après la grande offensive du Pentagone contre la guerre perpétuelle, sans fin contre le terrorisme qui n’a plus rien d’abstrait puisqu’il est incarné dans le Musulman.

Le nouvel investissement militaire de l’Afrique par les Usa se fait au nom de la lutte contre le terrorisme islamique. La plus grande base de drones jamais construite par les Usa se situe à Agadez, au Niger, elle est désormais pleinement opérationnelle.

Le terrorisme islamique et l’islamophobie qui en est la version adaptée à l’usage des médias occidentaux continue vingt ans après le 11 septembre 2001 à nourrir le complexe militaro-industriel aux Usa particulièrement, et à servir de faux-nez à la concurrence musclée avec les économies émergentes. Tenant cette partie de l’Afrique dans un étau entre leur base à Djibouti et celle d’Agadès, les Usa risquent de s’appuyer sur les généraux algériens ébranlés par un Hirak toujours renaissant pour mettre hors jeu la France.

Serval et Barkhane auront enlisé l’ancienne colonie dans une guerre ingagnable contre des ‘terroristes islamistes’ trafiquants en tout genre pour le plus grand bien d’une autre puissance.

La réactivité en miroir d’une infime minorité de musulmans aux offenses délibérées ou induites faites à leur religion est devenue le moteur perpétuel d’une islamophobie de l’État français, démuni depuis longtemps de toute possibilité d’agir, réduit au rôle subalterne de simple commis des Commissions de l’Union européenne.

Le seul champ qu’il est encore en capacité d’investir est celui du sociétal, défendre les minorités sexuelles et diaboliser, ostraciser, une fraction de la population qui se revendique d’une foi monothéiste dont la pratique est réfractaire à un encadrement clérical, difficile à dompter par une autorité profane.

Les programmes électoraux à venir ne vont retentir que de sa prétendue volonté de séparatisme et des mesures intrusives plus ou moins adéquates pour lui ôter ce qui la marque dans l’espace public. L’exécutif s’occupe même de dicter aux associations confessionnelles le contenu de l’enseignement religieux, rejetant par là le principe d’étanchéité entre l’État et ‘l’Église’ qui a gouverné la loi de 1905.

L’exécutif tient à occulter l’impéritie criminelle dont il a fait preuve tout au long de l’épidémie de la COVID-19 qu’il a transformée en crise sanitaire à rallonge. Il souhaite que les imams enseignent les bienfaits de l’homosexualité pour ne pas à avoir à rendre compte des privatisations des retraites et de nombre de services publics, de la réforme de l’assurance chômage, de la casse du Droit du Travail.

La construction de la figure d’un Ennemi Intérieur, terroriste, séparatiste ne tient pas. Cet ennemi imaginaire n’est en rien responsable de l’existence de dix millions de pauvres en France. Les Gilets Jaunes se sont révoltés contre un système oppressif, autoritaire et fondamentalement anti-démocratique au service du Grand Capital.

La fabrication du terrorisme islamique à des fins impérialistes de l’Occident est davantage prégnante, son dispositif complexe fait appel à des instruments très sophistiqués de propagande à l’échelle planétaire. Mais nul doute que c’est l’archétype de l’Ennemi Extérieur insaisissable et toujours prêt à frapper de manière aveugle qui alimente la diabolisation d’un simulacre d’Ennemi Intérieur.

Les peuples n’ont qu’un seul ennemi véritable, le système capitaliste qui broie leurs identités, les appauvrit et les recrute comme belligérants dans des guerres idéologiques ou réelles où ils seront toujours les perdants.

CONCLUSION

L’Islamophobie dans sa version récente postcoloniale date d’une quarantaine d’années. Sa genèse répondait surtout à des impératifs dictés par les intérêts géostratégiques étasuniens et israéliens. Les Usa ont créé al Qaïda pour contrer l’URSS puis ont soutenu ses rejetons en Irak , en Libye et en Syrie pour détruire des pays relativement avancés parmi les nations émergeant du sous-développement tout en orchestrant une croisade idéologique contre l’Islam.

Le Center for American Progress (CAP), institut non partisan, avait fait en 2011 une enquête qui a permis de cartographier un réseau d’organisations ‘à but non lucratif’, d’universitaires et d’experts qui ont mobilisé des fonds importants pour disséminer dans l’opinion américaine d’abord puis dans le monde un dénigrement systématique de l’islam et les musulmans.

En plus d’être des terroristes, les Musulmans se seraient lancés à la conquête de l’Occident pour y faire régner leurs lois coraniques, rétrogrades, inégalitaires et fondamentalement misogynes. L’ensemble est structuré autour de huit donateurs qui ont contribué pour 52 millions de dollars en dix ans et de six experts seulement (tous des néo-conservateurs sionistes).

Par un système de réseaux mobilisant habilement médias, décideurs politiques et professionnels de l’enseignement, allant jusqu’à la rédaction de manuels de formation pour les écoles militaires, ils ont réussi à générer une atmosphère islamophobe planétaire.
Pour peu qu’un malade mental agite un couteau dans une galerie marchande- le nombre des psychotiques en circulation va croissant- une nouvelle vague fustigeant les musulmans- tous extrémistes- se déverse dans toute la presse.

L’islam est un ensemble de croyances organisé autour d’Écritures sacrées, le Coran, et de traditions prophétiques. La diffusion de cette religion a donné naissance à une aire culturelle à partir de laquelle elle n’a cessé d’être interprétée selon les époques, le plus souvent d’une manière qui a bénéficié aux systèmes politiques contemporains.

En dehors des grandes écoles juridiques, des sectes ont vu le jour, contestatrices du pouvoir. La société secrète des Hashishines a sévi en Syrie, entre le XIème et XIIIème siècles, combattant les Turcs Seldjoukides et les Croisés. L’organisation fonctionnait comme une entreprise qui opérait des assassinats ciblés à l’aide de poignards, redoutable et insaisissable.

Une dérive fanatique de l’Islam est donc bien attestée historiquement, Al Qaïda et Daesh en sont une sorte de réminiscence. L’analogie peut être poussée davantage. Le gourou de la secte ismaélienne aurait obtenu de ses disciples une obéissance absolue et les aurait endoctrinés en utilisant du hashish. Les deux tonnes de Captagon (drogue de synthèse à type d’amphétamine) saisies dans un avion privé saoudien à Beyrouth en 2015 étaient en partie destinées aux miliciens de Daesh.

La nouvelle orientation de la politique étrangère étasunienne privilégie depuis quelques années l’endiguement de la Chine et de la Russie considérées comme une menace majeure, laissant loin derrière elles celle du terrorisme islamique. Cette inflexion est perceptible car l’islam disparaît comme thème majeur dans les médias internationaux.
Au contraire, il est demandé de la compassion envers les Ouïghours, musulmans turcophones de la province chinoise du Xinjiang, ‘martyrs’ du Parti communiste chinois.

En France, 676 incidents islamophobes ont été recensés par le Collectif contre l’islamophobie en France en 2018 (CCIF [1]

Les attaques terroristes qui ont eu lieu en France ces dernières années ont fait adopter une politique antiterroriste ambiguë, source d’une criminalisation accrue de la communauté musulmane.
Après les terribles attentats de novembre 2015 qui avaient fait 134 victimes, 3 289 perquisitions, dont la moitié de nuit, ont été effectuées au détours de l’instauration d’un état urgence et plus de 400 assignations à résidence.

Tout ce bruit médiatique n’a abouti à établir que quatre procédures judiciaires seulement pour terrorisme, dont une seule a donné lieu à une mise en examen.

La performance est ridicule mais l’efficacité est ailleurs.
Elle stigmatise les musulmans et étend le pouvoir de surveillance de l’État qui collectera toute donnée susceptible de prévenir le terrorisme.

Ce durcissement sécuritaire est arrivé à point pour opérer les bouleversements du Code de Travail exigés depuis des décennies par le patronat qui ont débuté sous le quinquennat de Hollande et qui se sont poursuivis sous celui de Macron.
La technique des gazages intempestifs de manifestations des travailleurs a été expérimentée et mise au point le 1er mai 2016. Le début du quinquennat de Macron a été marqué par l’abandon relatif du thème de l’islamisme.

Les attentats terroristes ont produit un effet d’aubaine, l’état d’urgence est presque devenu la norme et tout activité militante a été criminalisée. La situation de quasi-pleins pouvoirs donnés au ministère de la police s’est révélée lors de la répression du mouvement des Gilets Jaunes.

La contre-réforme de la retraite puissamment contestée par tous les corps de métiers, les syndicats des avocats n’ont pas été de reste, fut suivie de près par une épidémie que l’exécutif n’a pas su ni pu gérer correctement. Des décennies de destruction du service public aussi bien dans le secteur hospitalier que dans la recherche fondamentale ont mis au jour les effets de l’austérité budgétaire sur le service public programmé pour disparaître au profit du privé.

S’attendant à une colère populaire à la mesure de l’impéritie dont a fait preuve un gouvernement d’incompétents notoires et (donc) de criminels, sur les conseils d’un cabinet de stratégie étasunien sans doute, à l’automne 2020, le cap fut de nouveau pris pour attaquer les citoyens français musulmans.

Vivant le plus souvent relégués dans des banlieues pauvres, ils ont été accusés de séparatisme. Tambour battant, de nouvelles couches réglementaires et législatives coercitives furent adoptées à leur encontre. Ceux qui osèrent élever la voix pour dénoncer la scélératesse de Macron furent à leur tour accusés d’un crime nouveau, l’islamo-gauchisme.
Dans la suite de loi contre le séparatisme, celle ‘confortant le respect des principes de la République’ limite les libertés publiques et menace l’existence des associations.
Même la Ligue des Droits de l’Homme, vieille dame momifiée et muette sur beaucoup de sujets, s’en est émue !

Elle jette une suspicion généralisée sur les personnes de confession musulmane et met en péril la ‘liberté d’expression’. Comme ce fut le cas avec les ‘Patriot Act’ aux Usa en 2001, les lois islamophobes adoptées par la France atteignent d’abord les musulmans mais elles sont un véritable cheval de Troie pour instaurer un régime autoritaire.

Il s’agit en terrorisant les plus vulnérables de poursuivre la casse de tous les acquis sociaux.

Les programmes électoraux à venir ne vont retentir que de la prétendue volonté de séparatisme et des mesures intrusives plus ou moins adéquates pour lui ôter ce qui marque cette communauté dans l’espace public.

La construction de la figure d’un Ennemi Intérieur, terroriste, séparatiste ne tient pas. Cet ennemi imaginaire n’est en rien responsable de l’existence de dix millions de pauvres en France. Les Gilets Jaunes se sont révoltés contre un système oppressif, autoritaire et fondamentalement anti-démocratique au service du Grand Capital.

La fabrication du terrorisme islamique à des fins impérialistes de l’Occident est prégnante, son dispositif complexe a fait appel à des instruments très sophistiqués de propagande à l’échelle planétaire. Mais nul doute que c’est l’archétype de l’Ennemi Extérieur insaisissable et toujours prêt à frapper de manière aveugle qui alimente la diabolisation d’un simulacre d’Ennemi Intérieur.

Les peuples n’ont qu’un seul ennemi véritable, le système capitaliste qui broie leurs identités, les appauvrit et les recrute comme belligérants dans des guerres idéologiques ou réelles où ils seront toujours les perdants.

Il nous incombe de dénoncer les pratiques discriminatoires à l’égard des musulmans, victimes réelles, d’un État qui ne cache plus sa nature, celui d’être l’instrument de la classe au pouvoir, celle des capitalistes transnationaux qui n’ont comme unique religion que le profit et pour moyen d’y parvenir, l’exploitation.


[1le CCIF et le CRI, Comité contre le Racisme et l’Islamophobie, sont les deux associations majeures qui défendent les musulmans et restent en justice quand elles sont sollicitées dans des situations de discrimination. Les interdire, c’est interdire à des personnes vulnérables d’avoir recours au droit.}] dissous par le gouvernement de Macron en octobre 2020) soit une augmentation de 52% par rapport à 2017.
13 % n’étaient que des discours de haine mais 84% représentaient des discriminations et 20 étaient des agressions physiques.

Nous ne sommes donc pas face à un ‘racisme fantasmé’, d’autant qu’au fil du temps des mesures institutionnelles qui limitent les pratiques cultuelles musulmanes ont été prises.[[2004 : Interdiction dans les écoles des symboles religieux, comprendre le foulard musulman.
En 2013, la circulaire Chatel interdit aux parents qui accompagnent leurs enfants en voyage scolaire d’arborer des symboles religieux
En avril 2011, un décret du Premier ministre interdit aux femmes de porter le niqab dans tout l’espace public.
En août 2016, validation par le Premier ministre de l’interdiction des maillots de bain couvrant le corps (burkini) par certaines municipalités.

   

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