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C’est le Figaro qui le dit : « Rationnement, coupures tournantes et black-out électriques : chronique d’un chaos annoncé »

vendredi 23 septembre 2022 par Jean Penichon

Pour ceux qui ont écouté le discourt de notre camarade Cédric Liechti (http://ancommunistes.org/ecrire/?exec=article&id_article=4260) aucune surprise dans ce texte de la droite. À force de suivre aveuglément les diktats des États Unis au détriment de l’intérêt de notre pays, sans se soucier des difficultés déjà rencontrées par les plus démunis, ce gouvernement hors-sol doit être combattu de toutes la force de l’immense majorité de nos concitoyens. La récession de l’énergie est une crise représentative du capitalisme en phase terminale. Tous et toutes à la manif pour demander le retour au service public de la production de l’Énergie, comme avant !(JP-ANC)

En se calquant sur l’idéologie verte allemande, l’État français a créé les conditions de la crise de l’énergie, explique l’ingénieur Christian Semperes. Nous sommes passés de la garantie de service au public à la gestion de la pénurie électrique, ajoute-t-il.

Nous sortons des deux précédents quinquennats avec l’idée que « le 100% renouvelable serait techniquement possible » et qu’on pourrait, de fait, arrêter le nucléaire sans aucun impact sur la garantie du service de l’électricité. Ceci alors même que le mix nucléaire et hydraulique a garanti depuis plus de 43 ans une électricité à un prix parmi les plus bas d’Europe aux Français.

Cette idée s’appuie sur une méconnaissance du domaine énergétique et sur le matraquage de croyances issues de l’idéologie verte allemande de la part de l’État français. En résumé, l’idéo-logique écolo a remplacé l’éco-logique et la logique scientifique. Explications.

Le dernier black-out électrique en France date du 19 décembre 1978, soit 353 jours après la mise en service industrielle de la première tranche nucléaire de Fessenheim qui ouvrait l’ère de la transition énergétique, de 1978 à 1999, en remplaçant les énergies fossiles par un mix énergétique nucléaire et hydraulique.

Depuis 43 ans, la France a vécu, sans rationnement, sans black-out, dans ce qu’Emmanuel Macron appelle « l’abondance ». Les agents du service du public appellent ça « la satisfaction des besoins de l’économie de la France et des Français avec une qualité et continuité de service favorisant un excédent du commerce extérieur ». L’État actionnaire majoritaire a des pertes de mémoire. C’est ainsi.

En se calquant sur l’idéologie verte allemande, l’État français a ainsi construit 33 GW de moyens de production solaire et éolien aléatoirement intermittents, moyennant 121 milliards d’euros de subventions publiques. Il a fermé en 2020 les 2 réacteurs de Fessenheim en parfait état de marche, sûrs d’après l’Autorité de Sûreté Nucléaire, bas carbone (4 g CO2/kWh), pilotables, économiquement rentables et amortis. Mais ce n’est pas tout.

Il a également rédigé une loi n°1908 du 30 avril 2019 qui prévoit la fermeture de 12 autres réacteurs dans le même état que Fessenheim mais encore plus sûrs puisqu’ils auront intégré les modifications de sûreté de la 4e visite décennale. Comble de l’ironie, il a construit et démarré une centrale au gaz (418 g CO2/kWh) à Landivisiau en Bretagne, en pleine crise du gaz en mars 2022 et… prévu de rouvrir la centrale au charbon (1050 g CO2/kWh) de Saint Avold en Moselle, fin 2022.

À l’évidence, la capacité de production du parc hydraulique sera réduite cet hiver, le temps que les barrages reconstituent leur capacité après la fonte des neiges au printemps 2023.
Christian Semperes

Nous voyons aujourd’hui le résultat de cette politique énergétique imposée par l’Allemagne via la Commission européenne. Après l’arrêt de son nucléaire, l’Allemagne s’est rendue totalement dépendante du gaz russe. Et pour éviter le rationnement de l’électricité, l’Allemagne est contrainte à réactiver ses centrales au charbon très émettrices de CO2, même après avoir construit 127 GW d’énergies renouvelables solaire et éolien, soit 4 fois plus que la France.

En résumé, puisque les moyens de production renouvelables sont aléatoirement intermittents, on va manquer de moyens de production électriques pilotables pour satisfaire la consommation d’hiver, qui double par rapport à l’été.

Le facteur de charge moyen du parc solaire est de 15 % sur l’année. En période proche du solstice d’hiver, ce facteur de charge tombe largement au-dessous de 10%. Même avec 12 GW de puissance installée, la puissance fournie est epsilonesque au regard de la consommation. On ne peut donc pas compter sur le solaire. Le facteur de charge du parc éolien, quant à lui, est de l’ordre de 20 % sur l’année.

En période d’anticyclone d’hiver et donc de froid intense induisant une forte consommation électrique, le vent peut ne pas souffler pendant plus de deux semaines (ce fut le cas, au moins, en janvier février 2021 et 2022). Même avec 19 GW de puissance installée, le facteur de charge est également négligeable au regard de la consommation. On ne peut donc pas compter sur l’éolien non plus. Avec la période de sécheresse que nous avons traversée en 2022, les niveaux d’eau des barrages sont bas.

À l’évidence, la capacité de production du parc hydraulique sera réduite cet hiver, le temps que les barrages reconstituent leur capacité après la fonte des neiges au printemps 2023. À partir de 2021, le parc nucléaire de 900 MW a entamé ses réévaluations de sûreté des 4e visites décennales, avec des modifications de grande ampleur pour améliorer encore plus la sûreté. Il s’agit d’arrêts particulièrement longs, de l’ordre de plusieurs mois.

Ces modifications sont réglementaires, le producteur ne peut pas s’y soustraire sous peine de non-validation de redémarrage de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). La capacité du parc nucléaire sera donc diminuée.

Crise ukrainienne, et donc du gaz, oblige, c’est grâce au charbon que nos dirigeants politiques espèrent « passer l’hiver ». L’Allemagne réactive des centrales au charbon, la France aussi réactive la centrale de Saint-Avold.
Christian Semperes

S’ajoute à cela le doute sur la corrosion de certaines parties de tuyauteries qui a contraint l’exploitant nucléaire à arrêter 16 réacteurs sur l’ensemble de l’année 2022. Sur certains réacteurs, des contrôles destructifs ont été réalisés (coupures de tuyaux) qui nécessitent maintenant de les réparer.

Or, comme l’a dit récemment Jean-Bernard Lévy, PDG d’EDF, « on manque de bras parce qu’on n’a pas assez d’équipes formées. […] On nous a dit “votre parc nucléaire va décliner, préparez-vous à fermer des centrales” […]. Évidemment on n’a pas embauché des gens pour en construire d’autres ». La capacité du parc nucléaire sera donc d’autant plus diminuée. Et quand on suit aveuglément une idéologie en l’absence de raisonnements physiques et scientifiques, on arrive au paroxysme de la logique idéo-logique.

Crise ukrainienne, et donc du gaz, oblige, c’est grâce au charbon que nos dirigeants politiques espèrent « passer l’hiver ». L’Allemagne réactive des centrales au charbon, la France aussi, j’en ai parlé plus haut, réactive la centrale de Saint-Avold. Est-il besoin de rappeler ici que le charbon est la plus polluante des énergies ?

L’État demande d’ores et déjà des économies d’électricité. Suffiront-elles ? Cet été, les gestionnaires de réseau et de distribution électrique RTE et Enedis ont élaboré des plans de coupures tournantes pour cet hiver. Voilà comment, en deux quinquennats et quatre mois, on passe de la garantie de service au public à la gestion de la pénurie électrique.


Ingénieur énergéticien, Christian Semperes a participé au démarrage des 58 réacteurs REP des années 1980-1990, à la conduite des installations, et à la formation sur simulateur des exploitants nucléaires.

   

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