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« Nous assistons actuellement à des changements tels que nous n’en avons pas connu depuis 100 ans » ( Xi Jinping)

vendredi 24 mars 2023 par Aymerich Michel /Fiodor Loukianov

J’ai découvert l’article de Fiodor Loukianov, Une nouvelle ère : la Chine assume enfin son rôle de superpuissance, sur la page FB du groupe Wir wollen die DDR 2.0 in ganz Deutschland (Fr : Nous voulons la RDA 2.0 dans toute l’Allemagne). Je ne partage pas les éléments de vocabulaire non marxistes de cet auteur russe ni même certaines idées. Pour autant, je juge l’article intéressant dans son ensemble... Les mots mis en gras le sont par moi.

Avant que vous ne lisiez l’article que je reproduis plus bas de Fiodor Loukianov (rédacteur en chef de Russia in Global Affairs, président du présidium du Conseil de la politique étrangère et de défense et directeur de recherche du Valdai International Discussion Club), je voudrais rappeler la tenue d’un évènement d’importance mondiale et sans doute historique qui accroît le sens de l’article.

Récemment Xi Jinping, secrétaire général du Parti communiste chinois et chef de l’État socialiste chinois, a rencontré à Moscou le président Vladimir Poutine que je ne présenterai pas au lecteur que j’invite toutefois à lire l’article suivant... [1] après lecture de ce qui suit (article introductif et article de Fiodor Loukianov).

L’avocat Régis de Castelnau fait judicieusement remarquer sur sa page FB :

« Le voyage de Xi à Moscou est évidemment un événement de portée considérable. Dans l’affichage de ce qui est une alliance entre deux puissances décidées à entamer le processus pour mettre fin à l’hégémon américain sur le monde.

Mais aussi au regard de toutes les décisions prises et notamment celle-ci : Vladimir Poutine :
« Nous soutenons l’utilisation du yuan chinois pour les paiements entre la Russie et les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine ». En bon français, concernant la plus grande réserve de matières premières du monde, c’est l’annonce d’un basculement qui risque de nous faire mal à la tête.

Et puis il y a celui-là, n’est pas mal non plus : le lancement du gazoduc « Power of Siberia-2 », qui va diriger l’essentiel ressources énergétiques de la Russie vers l’Asie. Nord Stream 2 restera un tas de ferraille au fond de la mer.

Naturellement pas un mot dans la presse système. LCI est occupée à mesurer et à commenter la taille des oreilles de Poutine pour démontrer que c’est un sosie qui a reçu Xi à Moscou.

Mais la bêtise et l’arrogance partent de loin.

Joe Biden devant le Conseil de l’Atlantique en 1997 : « Et puis les Russes m’ont dit : “Si vous continuez à élargir l’OTAN, nous allons nous lier d’amitié avec la Chine”. J’ai failli éclater de rire, j’avais du mal à me contenir et j’ai dit : “Bonne chance à vous. Si avec la Chine ça ne marche pas, essayez l’Iran” ».

Il avait encore deux neurones accrochés, c’est terminé aujourd’hui mais c’est quand même ce zombie que l’Empire a été cherché à l’EHPAD pour le mettre à sa tête.

Encore bravo... » [2]

En partant, après un dîner d’État, le président Xi Jinping, raccompagné par le président Poutine a déclaré :

« Nous assistons actuellement à des changements tels que nous n’en avons pas connu depuis 100 ans. Et c’est nous qui conduisons ces changements ensemble ».

Le président russe a déclaré en lui rendant sa poignée de main :
« Je suis d’accord ».
Ce à quoi le président chinois, avant de se diriger vers sa voiture, a répondu : « Prenez soin de vous, mon cher ami ». Le président Poutine lui a souhaité : « Bon voyage ».

Parmi les éléments que je conteste de l’article Fiodor Loukianov, voici une phrase :

« Une analyse détaillée de ce phénomène devrait être laissée à des spécialistes, mais il convient néanmoins de mentionner que le passage d’une telle vision du monde à une confrontation idéologique et géopolitique s’est produit lorsque la Chine a adopté une doctrine communiste occidentale - fondamentalement étrangère ».

Le fondement de ce préjugé culturel est bourgeois. La classe bourgeoise (quelque soit son origine nationale) est celle qui est socialement la plus intéressée à croire et à faire croire que le marxisme est « étranger »...

Tous ceux qui écrivent de la sorte se trompent d’autant plus que la révolution intellectuelle marxiste en Chine a ouvert la voie à littéralement des miracles historiques d’ordre politique, économique, social, scientifique, etc.

En 2013, Xi avait répondu à ce type d’accusation en déclarant :

« La voie capitaliste a été essayée et s’est avérée insuffisante. Le réformisme, le libéralisme, le darwinisme social, l’anarchisme, le pragmatisme, le populisme, le syndicalisme - tous ont eu leur moment sur la scène. Ils ont tous échoué à résoudre les problèmes du destin futur de la Chine. C’est le marxisme-léninisme et la pensée de Mao Zedong qui ont guidé le peuple chinois hors de l’obscurité de cette longue nuit et ont établi une nouvelle Chine ; c’est grâce au socialisme aux caractéristiques chinoises que la Chine s’est développée si rapidement » [3].

La révolution intellectuelle marxiste en Russie devenue URSS avait également commencé à produire des miracles politiques, économiques, sociaux, scientifiques, etc. que la bourgeoisie mondiale par le moyen de la guerre impérialiste ouverte contre elle a voulu anéantir par deux fois (1918-22 et 1941-45) !
La troisième guerre contre elle, combinant de manière ininterrompue « guerre froide » et guerres chaudes à très chaudes à sa périphérie, a facilité/contribué à la honteuse trahison dont a été victime l’URSS à la fin des années 80 du siècle dernier... [4]

La Russie, principale république constitutive de l’Union soviétique, se porterait infiniment mieux aujourd’hui dans les conditions de l’existence de l’URSS qui devra renaître de ses ruines !

Photo : La photo de "Bidon" hurlant de dépit en haut au centre a été ajoutée par un internaute astucieux qui a bien compris ce qu’a dû être la réaction du gérontocrate, représentant d’une partie du monde en état d’obsolescence inéluctable...


Une nouvelle ère : la Chine assume enfin son rôle de superpuissance

7 mars. 2023 13:38

La sphère internationale s’oriente de plus en plus selon deux blocs, l’un dirigé par les États-Unis et leurs alliés, l’autre par Pékin et Moscou. Qu’on le veuille ou non, le réalignement des forces sur la scène mondiale suit son cours.

Par Fiodor Loukianov

Depuis la semaine dernière, Pékin a considérablement intensifié ses activités diplomatiques. Cela n’est pas seulement dû au fait que la Chine s’est libérée de la longue isolation pandémique qui limitait auparavant sa marge de manœuvre. Le motif principal est que le rôle et le poids de la Chine dans l’arène internationale se sont accrus au point qu’une distanciation géopolitique contemplative n’est plus possible. Il s’agit là d’un changement important dans la conscience que la Chine a d’elle-même. La question est maintenant de savoir à quels changements cela va conduire dans la pratique.

Le règlement de comptes général de la Chine : l’hégémonie des États-Unis et ses dangers

Le non-agir comme vertu suprême et l’interpénétration des contraires sans contradiction sont des principes d’une philosophie traditionnelle, mais aussi une manière éprouvée d’évoluer sur la scène internationale. Une analyse détaillée de ce phénomène devrait être laissée à des spécialistes, mais il convient néanmoins de mentionner que le passage d’une telle vision du monde à une confrontation idéologique et géopolitique s’est produit lorsque la Chine a adopté une doctrine communiste occidentale - fondamentalement étrangère*.

[* Voir mon commentaire plus haut ! M.A.]

Mao Zedong a tenté de changer non seulement l’ordre social, mais aussi la culture des Chinois. Son règne s’est toutefois terminé par un accord commercial avec les États-Unis, ce qui signifiait un retour à un équilibre stratégique plus conforme à la vision chinoise du monde*. La reconnaissance mutuelle n’était toutefois pas synonyme d’accord et d’harmonie, mais correspondait aux objectifs stratégiques des deux parties à l’époque. Cette période dans les relations de la Chine avec les États-Unis, qui était encore valable il y a peu, semble maintenant toucher à sa fin.

  • [* Ce n’est pas prioritairement une question de « vision chinoise du monde », mais d’appréciation on ne peut plus marxiste du rapport des forces à un moment donné et de la reconnaissance non moins marxiste que « La révolution chinoise a triomphé parce qu’elle a su appliquer les principes universels du marxisme-léninisme à la réalité du pays. Dans le domaine de l’édification socialiste, nous avons fait des expériences positives et négatives. Ces deux sortes d’expériences sont également utiles. Il convient surtout de porter l’attention sur les erreurs “de gauche”. L’histoire a prononcé son verdict sur le résultat désastreux de ces erreurs “de gauche”. Par esprit révolutionnaire, nous sommes enclins à précipiter le cours des événements. Notre intention, bonne en soi, d’accéder au plus tôt au communisme, nous empêche le plus souvent d’analyser avec lucidité les données objectives et subjectives, si bien que nous négligeons parfois la loi du développement du monde objectif. La Chine a commis des erreurs pour avoir voulu aller trop vite » (Deng Xiaoping, https://a-contre-air-du-temps.over-blog.com/2020/12/adapter-constamment-le-marxisme-aux-conditions-chinoises-et-faire-briller-davantage-le-marxisme-contemporain-en-chine.html). M.A.]

Aux États-Unis, on discute beaucoup des décennies passées et l’on déplore que la Chine soit le pays qui ait le plus profité de l’interaction entre les deux États. Cela peut être contesté, mais en général, il est difficile de nier que Pékin a été le principal bénéficiaire - du moins en ce qui concerne la transformation du pays et sa place sur la scène internationale. La stratégie de Deng Xiaoping, celle d’une ascension tranquille et progressive du pays, était tout à fait dans l’esprit des Chinois, et le résultat l’a sans aucun doute justifié. A tel point qu’il était difficile pour Pékin de comprendre que cette période extrêmement favorable et avantageuse pouvait prendre fin.

Le règlement de comptes général de la Chine : l’hégémonie économique et technologique des États-Unis.

Mais cette fin s’est avérée inévitable pour une raison simple : la Chine a acquis une position de puissance qui fait d’elle un rival potentiel des États-Unis, quels que soient ses désirs et ses intentions. Et cela a conduit à une transformation naturelle de l’approche américaine vis-à-vis de Pékin. Après tout, le style américain est l’exact opposé du style chinois classique décrit plus haut. Et les tentatives de la Chine de freiner la pression américaine croissante dans les années 2010 et au début des années 2020 se sont heurtées à la ferme intention de Washington de faire passer sa relation avec Pékin dans la catégorie de la concurrence stratégique. Dans le même temps, la capacité de la Chine à s’affirmer et sa confiance en elle ont également augmenté, mais si cela ne dépendait que de Pékin, la période de coopération profitable aurait pu durer encore quelques années.

Quoi qu’il en soit, une nouvelle ère s’est ouverte. Le réveil de la Chine dans l’arène diplomatique montre que Pékin n’a pas peur de jouer un rôle dans la politique mondiale. La forme de son engagement international porte certes encore la marque de la période précédente et d’une approche très traditionnelle - la précision stérile des formulations de la proposition de paix chinoise sur la question ukrainienne en témoigne. Mais cela aussi devrait changer. Le souhait de la Chine de conserver une neutralité bien intentionnée vis-à-vis de l’extérieur convient à Moscou. C’est l’Occident qui accuse à la légère la Chine de manque de sincérité, et ce sur un ton qui ne plaît pas du tout aux Chinois. Il ne faut certes pas s’attendre à un revirement brutal de Pékin, car cela irait à l’encontre de son sens des convenances, mais la direction est donnée.

La question n’est pas de savoir si la Chine partage l’appréciation de la Russie sur ce qui se passe en Ukraine. Pékin a soigneusement évité d’exprimer une opinion et de prendre position parce qu’elle ne considère pas cette affaire comme la sienne. Qu’on le veuille ou non, le rééquilibrage des forces sur la scène mondiale suit son cours, avec la Chine et la Russie d’un côté, et les États-Unis et leurs alliés de l’autre. Et cela deviendra de plus en plus évident à partir de maintenant.

Changement de décor sur l’échiquier : bientôt ce ne sera plus la Russie, mais la Chine ?

En dix ans à la tête de son pays, Xi Jinping a changé la politique intérieure et extérieure de la Chine. D’une part, il a souligné plus clairement que ses prédécesseurs la vision classique chinoise, d’autre part, il a apprécié les mots d’ordre et les idées liés au socialisme*. Le premier implique une harmonie autarcique, tandis que le second tend à regarder à la fois vers l’extérieur et vers l’intérieur. Cette symbiose déterminera probablement le positionnement de la Chine au cours des cinq ou dix prochaines années du règne de Xi. L’environnement international hostile mettra de plus en plus à l’épreuve la capacité de Pékin à maintenir un équilibre acceptable. Beaucoup dépendra du succès de ces tentatives - y compris pour la Russie.

  • [* Au marxisme ! « Le marxisme est la pensée directrice fondamentale qui est à la base de la pérennité et du développement de notre parti et de notre pays. Quelle est la raison du succès du Parti communiste chinois ? Pourquoi la bonne voie à suivre est celle du socialisme à la chinoise ? La pratique nous a montré que c’est foncièrement grâce au marxisme ; c’est le marxisme sinisé et actualisé qui est au cœur de cette réussite. Le fait d’avoir comme boussole la théorie marxiste scientifique constitue la clé qui permet au Parti de raffermir sa foi et ses convictions, et de prendre des initiatives tout au long de l’histoire » (Xi Jinping), https://a-contre-air-du-temps.over-blog.com/2022/10/quelques-extraits-et-lien-vers-texte-integral-du-rapport-au-20e-congres-national-du-parti-communiste-chinois.html. M.A.]

Traduit de l’anglais en allemand et de l’allemand en français.


Voir en ligne : https://a-contre-air-du-temps.over-...

   

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