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interview avec C. Liechti, responsable CGT Energie Paris

jeudi 21 octobre 2021 par Unité CGT

Mobilisations dans l’Énergie, luttes contre les dérives liberticides, projets CGT, affiliation à la FSM, centrale de Gardanne, luttes contre la répression d’État : Unité CGT s’est longuement entretenus avec notre camarade Cédric Liechti, responsable CGT Énergie Paris.

UnitéCGT
1/ Les projets Hercule et Clamadieu ont été mis de côté par le gouvernement.
Cette victoire, à mettre au crédit de la FNME CGT et des travailleurs de l’Energie, mobilisés et en grève, est-elle temporaire ?
Quels sont les principaux axes d’attaques du capital contre les travailleurs de l’Energie ?

Cédric Liechti

Tout d’abord il s’agit effectivement d’une victoire importante du camp des travailleurs dans un contexte très compliqué.

Pour rappel, le projet Hercule est sorti aux alentours de mars 2019 et il était prévu initialement qu’il soit mis en place fin 2019.

Le 19 septembre 2019, les électriciens et gaziers ont manifesté partout dans le pays avec des pourcentages de grévistes importants partout dans le pays.

Puis est arrivé le 5 décembre 2019 le grand mouvement interprofessionnel contre la retraite à points.

Du coup, le PDG d’EDF a reporté une première fois la mise en place du projet craignant un embrasement social.

Puis le Covid est arrivé en France début 2020 et, profitant du confinement et des différentes mesures coercitives et antisociales mises en place par le gouvernement, le projet Hercule a été remis sur le devant de la scène sur injonction de Bruxelles, pour une application à juin 2021.

S’en est suivi une grande campagne de lutte et d’information auprès de la population et des politiques, qui a eu lieu sur plus d’un an mené par la CGT et les agents, et dont le point d’orgue a été la grande manifestation nationale du 22 juin 2021, où 13000 électriciens et gaziers ont déferlé sous une pluie battante, dans les rues de la capitale et, qui a donné le coup d’arrêt décisif au projet Hercule.

Du coup, au mois de juillet 2021, le gouvernement a discrètement annoncé le retrait provisoire du projet Hercule après la prochaine présidentielle.

Nous avons donc gagné une grande bataille mais pas la guerre.

Il est important de souligner que la manifestation du 22 juin s’est organisée par la seule volonté et à l’appel de la seule CGT et que toute cette longue lutte, malgré des appels de toutes les organisations syndicales, a été mené tant fédèralement que sur les sites de travail, par la seule CGT.

Aujourd’hui, les principaux axes d’attaque du capital résident dans l’utilisation de la crise dite covid et des mesures coercitives mises en place par le gouvernement.

Pour cela, les employeurs attaquent frontalement notre grille salariale et donc nos salaires, avec comme conséquences la division par 2 de notre évolution salariale sur une carrière complète et la division par 23 de la valeur de nos avancements de 2,34% à 0.1%.

Par ailleurs, chez le distributeur d’électricité Enédis, une note nationale est sortie au mois d’août indiquant les conditions dans lesquelles un agent pourra voir son contrat de travail et son salaire suspendu faute de pass sanitaire.

Ajoutons à cela, une politique agressive de fermetures de sites de travail, profitant de la mise en place du télétravail, qui a permis un désengagement important des employeurs et de leurs obligations amenant à une ubérisation du travail (le salarié se paye son bureau, sa chaise, sa lampe, son repas, son local qui est sa maison, son électricité, son internet, etc…

UnitéCGT
2/ Les tarifs de l’énergie s’envolent, les usagers vont payer de leur poche la privatisation de notre service public de l’énergie.
Quelles solutions la CGT Energie Paris porte-t-elle pour mettre un terme, et à la destruction de nos industries électriques et gazières, et à la hausse sans fin des tarifs ?

Cédric Liechti

Il n’y a qu’une seule solution et elle porte sur la propriété de l’entreprise. C’est donc la nationalisation totale du secteur de l’énergie sous contrôle 100% public qui est la solution.

Mais nous y ajoutons le contrôle démocratique qui doit être fait exclusivement par les représentants démocratiquement élus des usagers et des agents pour éviter une étatisation.

Cela implique la fin totale de la concurrence, un tarif régulé unique du gaz et de l’électricité et la création de deux entreprises publiques edf et gdf où la production, le transport, la distribution et la fourniture d’Électricité et de gaz à l’usager sont intégrés.

Concernant les prix de l’électricité, entre 1946 avec la mise en place de la loi de nationalisation de l’électricité et du gaz et 2004 date de libéralisation du marché de l’énergie, nous avions les prix du gaz et de l’électricité les moins chers d’Europe, depuis 2004, les prix du gaz ont augmenté de 90% et ceux de l’électricité de plus de 60%.

Il faut bien comprendre, que comme les prix régulés publiques étaient très bas, pour permettre la concurrence, il a fallu les augmenter artificiellement ces prix et c’est ce processus qui est toujours à l’œuvre.

L’ancien directeur d’EDF Marcel Boiteux grand patron capitaliste a d’ailleurs dit « on nous dit que la concurrence va permettre de baisser les prix, mais la réalité c’est qu’il va falloir augmenter les prix pour permettre la concurrence ».

Ajoutons que le 19 octobre, tous les électriciens et gaziers de France sont appelés à se mettre en grève concernant notre grille salariale et donc nos salaires.

En effet alors que des expertises économiques viennent de révéler qu’en 10 ans (2010-2020) les électriciens et gaziers ont produit presque 40 % de richesse en plus à savoir 236 000 euros de richesses produites par les électriciens par agent et par an et 223 000 euros de richesse produites par les gaziers par agent et par an.

Alors que la moyenne de remontée de dividendes sur cette même période est de plus de 5 milliards par an pour les actionnaires privés qui ne produisent rien et qui ne sont aucunement au service des usagers, les employeurs de notre branche cherchent à diviser aujourd’hui nos avancements par 23 pour les ramener à 0,1 % et à diviser par deux l’évolution de carrière global pour un agent passant de 35 % à 15 %.

Depuis la privatisation en 2004 les employeurs ont tellement attaqué nos salaires qu’aujourd’hui le départ de notre grille salariale est passé sous le SMIC et n’est même plus applicable car sous le seuil minimum du salaire de base.

C’est pourquoi nous serons mobilisés massivement pour exiger que l’intégralité des richesses que nous produisons et qui sont énormes reviennent exclusivement aux agents dans leur salaire et aux usagers avec des investissements massifs dans l’entretien du réseau et pour l’interdiction des coupures non paiements pour les plus pauvres.

Il faut bien comprendre que pour arriver à de telles sommes détournées par les actionnaires il a fallu fermer l’intégralité des accueils physiques EDF GDF sur le territoire national en supprimant la proximité avec les usagers, il a fallu augmenter les prix de l’électricité de plus de 60% et ceux du gaz de plus de 90 % que le sort des usagers et des agents sont intimement liés et que l’on doit s’unir dans un combat pour que le service public de l’électricité et du gaz appartiennent exclusivement à la nation et au peuple contre les intérêts du capital et des actionnaires privés.

Il n’y a pas de service public de haut niveau sans un statut de haut niveau pour les agents qui le font vivre.

UnitéCGT
3/ Nos libertés sont sous attaque.
En dehors du périmètre de l’entreprise, a-t-on raison, en tant que syndicaliste CGT, de se mobiliser contre les lois sécuritaires ?

Cédric Liechti

Le capital sous couvert de pandémie, a mis notre pays et notre peuple sous cloche, en nous confinant, en nous maltraitant et en nous punissant alors même que ce sont exclusivement les politiques capitalistes de destruction des services publics qui sont responsables de la situation actuelle.

Lors de la mise en place des autorisations de sortie par exemple, le gouvernement a donné le pouvoir au patronat de décider qui pouvait sortir de chez lui ou non puisque seule une autorisation de l’employeur pouvait te permettre de quitter ton domicile et d’utiliser les transports publics par exemple.

Le lien de subordination qui revient à un droit de vie ou de mort social qui existe en entreprise, a donc été élargi à toute notre existence pendant plusieurs mois au seul bénéfice des patrons.

Concernant la mise en place du pass sanitaire, il est bien évident que lutter pour son abolition est un combat cégétiste.

D’une part, interdire l’accès à certains lieux à une catégorie de la population qui ne serait pas vaccinée, est une atteinte fondamentale aux libertés, à la cohésion nationale et à l’égalité de traitement des personnes en créant justement des citoyens de secondes zones.

D’autre part, le pass sanitaire renvoi le à la responsabilité individuelle des citoyens face à la pandémie, or ce que nous vivons est de la seule responsabilité de la politique capitaliste européenne et française.

Par ailleurs, le pass sanitaire est une nouvelle arme dans la main du patronat qui l’utilise évidemment pour contourner toutes les règles du code du travail et permettre par exemple la suspension immédiate du contrat de travail et du salaire d’un salarié.

Il suffit de voir ce qui se passe dans le secteur de la santé où cet état assassin est en train de mettre à genoux le service public de la santé avec les milliers de suspension d’agents, ce même État, qui n’a fourni aucun masque au début de la pandémie, ce même État qui a continué de fermer des hôpitaux et des milliers de lits en pleine pandémie, ce même état qui a imposé que les personnels positifs au Covid continuent de venir travailler malgré le risque pour eux et pour les malades.

Donc oui, oui et encore oui, le combat contre toutes ces lois sécuritaires est bien un combat de classe, il devrait être un combat de toute la CGT et des partis de gauches.

Notre syndicat a appelé dès cet été à participer aux manifestations contre le pass sanitaire pour toutes ces raisons.

Et nous sommes en totale opposition avec des gens de notre camp, qui préfèrent rester chez eux au prétexte que l’extrême droite (par opportunisme) fait partie de certains cortèges.

Il est clair que si nous ne prenons pas la rue, nous leur laissons le champ libre, de plus et à titre d’exemple, lorsque notre camp s’est mobilisé avec succès en 2005 contre le traité de constitution européenne, l’extrême droite s’était également positionnée pour le non, mais nous avons mené une campagne nationale sur nos propres revendications et c’est bien sur ces bases revendicatives que nous avons remporté cette bataille.

Pour conclure, aujourd’hui et vu la mobilisation de nombreuses bases cgt, syndicats, ul et UD, la confédération s’est positionnée contre le pass sanitaire mais n’a à ce jour organisé aucune mobilisation d’ampleur sur ce sujet.

UnitéCGT
4/ Les travailleurs de Gardanne ont, avec le syndicat CGT, placé leurs outils de travail sous leurs protections. Est-ce un exemple de lutte à suivre ?

Cédric Liechti

Concernant la centrale de Gardanne, ce qui se passe là-bas est un combat qui dépasse largement la seule problématique des électriciens et gaziers.

En effet cette usine de production électrique a été vendu à un milliardaire tchèque qui spécule sur le dos des agents et des usagers et qui aujourd’hui a mis en place un PSE pour licencier l’intégralité des agents de ce site de production.

Ce qu’il faut savoir c’est que ce site a une capacité de production qui couvre 75 % de la consommation en énergie électrique des foyers des Bouches-du-Rhône.

Vous imaginez bien alors le désastre industriel et social que cela va représenter si cette usine est définitivement fermée et sa production arrêtée. C’est pourquoi nos collègues de Gardanne depuis trois ans maintenant mènent un combat pour le maintien du site de production et la réappropriation de l’outil industriel par les agents au service des usagers.

Nos collègues ont établi un projet ambitieux et écologique de reprise de l’usine et de production pour la population et ils ont décidé de mettre sous contrôle l’usine en excluant les nuisibles que sont les directions et le propriétaire qui marchent sur le service public sur les agents et sur l’intérêt des populations et de notre nation. C’est pour cela qu’il s’agit d’une lutte offensive de reprise de l’outil de travail et non pas d’une négociation visant à obtenir les cacahouètes issues d’un énième plan social.

C’est pour cela que ce combat concerne l’intégralité de notre classe sociale et que toutes les structures de la CGT doivent s’y investir pleinement et exporter ce modèle de lutte à toutes les entreprises aujourd’hui en France, pour que l’on passe enfin de luttes défensives stériles et vouées à l’échec à une véritable offensive généralisée coordonnée et confédérée de notre classe sociale et de tous les secteurs professionnels.
C’est le devoir impérieux de la CGT.

UnitéCGT
5/ Récemment, plusieurs syndicalistes de la CGT Énergie Paris sont passés en procès.
Peux-tu nous expliquer pourquoi le pouvoir cible nos camarades ?

Cédric Liechti

Effectivement, c’est la 2ème fois cette année, que des camarades de notre syndicat sont convoqués au commissariat suite à des actions syndicales que nous avons menées.

Pour être précis, il ne s’agit pas encore de procès mais d’instructions en vue d’un éventuel procès.

Dans la deuxième affaire où 7 camarades viennent d’être auditionnés cet été, des moyens importants et disproportionnés ont été mis en œuvre, puisque la police scientifique a été mobilisé, l’exploitation des caméras du métro parisiens ont été décortiqués pour tenter d’identifier des agents grévistes qui ont eu le tort de participer à un mouvement en 2018 sur 2 sites parisiens où nous avions interpellé notre direction pour la ré internalisation de tous les métiers et l’augmentation de nos salaires.

Il y a donc une volonté politique claire de faire peur et de tenter de faire condamner la structure CGT Énergie paris.

Selon nous, cela s’explique par le fait que notre syndicat ne s’est jamais positionné en tant que « partenaire social » du patronat mais comme un adversaire de classe résolu.

Par ailleurs, le fait que fédèralement, nous portons un projet de nationalisation totale du secteur de l’énergie au travers du Programme Progressiste de l’Énergie, et que nous venons de remporter la bataille importante contre Hercule, fait que les directions sont revanchardes

UnitéCGT
6/ La CGT Énergie Paris est affiliée à la Fédération Syndicale Mondiale. Peux-tu nous expliquer en quoi cette affiliation internationale a pu aider de façon concrète le syndicat dans ses luttes en France ?

Cédric Liechti

Nous sommes effectivement affiliés à la FSM d’une part parce que nous nous retrouvons complètement dans les orientations de cette organisation, y compris sur ses positions internationales.

Concrètement, dans tous les grands combats de ces dernières années, la FSM s’est positionnée en soutient des combats cégétistes que ce soient sur la loi travail, les ordonnances Macron, la bataille sur les retraites, etc… , et a organisé des mouvements de soutien à l’étranger, contrairement à la CES ou la CSI qui sont restées totalement muettes ou pire, qui ont pris des positions contraires à nos revendications, par exemple dans le domaine ferroviaire, où la CES revendique la libre concurrence dans le secteur du rail.

Par ailleurs, la FSM s’est directement positionné en début d’année pour dénoncer la répression syndicale dont nous faisions l’objet, ce qui a pesé vis-à-vis de nos directions parisiennes.

Quand une organisation mondiale revendiquant 105 millions d’adhérents intervient, cela contribue à inverser le rapport de force en notre faveur, et d’ailleurs dans cette affaire, le dossier a été classé sans suite.

   

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