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Pour Maître Rafik Chekkat « ceux qui dénoncent les massacres à Gaza sont davantage poursuivis que ceux qui les commettent »
dimanche 15 septembre 2024 par Feïza Ben Mohamed
En France, depuis le 7 octobre, des dizaines de personnalités ou de simples militants sont poursuivis pour « apologie du terrorisme » pour avoir dénoncé le massacre en cours dans la bande de Gaza.
La guerre déclarée par Israël sur la Bande de Gaza après l’attaque du 7 octobre continue de générer de nombreuses procédures judiciaires qui visent les soutiens de la cause Palestinienne.
Les perquisitions, interpellations et autres gardes à vue sont devenue monnaie courante pour de simples publications sur les réseaux sociaux et concernant des sportifs, des imams, des personnalités publiques autant que des anonymes.
Face à ce que certains qualifient de tentative de censure et d’atteintes aux libertés, de nombreux spécialistes s’interrogent sur le deux poids deux mesures qui permet de sanctionner ceux qui dénoncent les conséquences désastreuses de la guerre menée sur le peuple Palestinien alors que des soldats franco-israéliens continuent d’y participer en toute impunité dans les rangs de l’armée israélienne.
Dans un entretien à Anadolu, Maître Rafik Chekkat est revenu sur ces procédures et dénonce un « vaste mouvement répressif contre les voix qui s’érigent contre les massacres en cours à Gaza ».
Avocat de la mosquée des Bleuets, dans le viseur des autorités pour diverses déclarations en lien avec la situation en Palestine, de Smaïn Bendjilali, dit l’imam Ismaïl, il soulève une volonté de réprimer les soutiens de la cause Palestinienne.
« Une nouvelle fois, ceux qui dénoncent les massacres à Gaza sont davantage poursuivis que ceux qui les commettent, que les milliers de soldats français et franco-israéliens qui commettent actuellement des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et de la torture en Palestine, à Gaza » grince l’avocat marseillais avant de rappeler que ces poursuites interviennent après un signalement émanant des services préfectoraux du département des Bouches-du-Rhône.
Selon Maître Chekkat « la poursuite dont fait l’objet l’imam Ismaïl pour ces griefs là s’inscrit dans le vaste mouvement répressif contre les voix qui s’érigent contre les massacres en cours à Gaza » et mentionne notamment le cas de l’infirmière Imane Maarifi, placée en garde à vue le 5 septembre pour s’être opposée à la tenue d’un salon de l’immobilier israélien à Paris.
Il assure par ailleurs que « la répression qu’a failli subir la mosquée des Bleuets s’inscrit dans un mouvement plus large, d’attaques contre les droits et les libertés en France, mouvement qui vise plus spécifiquement les personnes de confession musulmane, les institutions musulmanes, les mosquées, les associations, les responsables religieux ».
Selon Rafik Chekkat, il existe « une spécificité de la répression contre les musulmans, c’est qu’elle a, d’une certaine manière, valeur d’exemple, en tout cas de test, c’est-à-dire qu’un certain nombre d’outils qui sont d’abord testés contre les personnes musulmanes, je pense à la loi séparatisme, à certaines de ses dispositions, sont ensuite élargies à d’autres collectifs, d’autres organisations, d’autres mouvements politiques ».
Et de poursuivre :
« C’est souvent ce qu’on appelle l’effet cliqué, c’est-à-dire qu’à partir du moment où une mesure entre en vigueur elle ne peut que s’étendre et viser des publics et un domaine bien plus larges que celui pour lequel elle à été conçue. À l’origine la loi séparatisme avait été comprise comme ne visant que les personnes musulmanes, ce pourquoi une grande partie de la population s’en était désintéressée mais maintenant avec le recul et des années après on commence à se rendre compte de ce qu’il y avait dans cette loi-là et de son potentiel discriminatoire. Et ce potentiel-là ne vise pas uniquement les personnes et organisations musulmanes ».
Pour illustrer son propos, l’avocat évoque le cas d’un de ses clients qui est poursuivi pour « incitation à la haine (…) pour avoir simplement cité le Coran, avoir mis des guillemets, un passage du Coran, fermez les guillemets ».
Interrogée par Anadolu début février au terme d’une convocation devant la police judiciaire de Paris après une publication dénonçant la colonisation, l’ancienne basketteuse française, Émilie Gomis expliquait avoir « payé » le prix de son engagement.
« La situation géopolitique actuelle amène les citoyens à s’exprimer. D’une certaine manière on ne peut plus rester silencieux, malgré mon statut et mes fonctions. Je l’ai payé (…). C’est un sujet sensible, c’est un sujet qui dépasse tout le monde. On est pris dans une machine à broyer donc il faut être prêt à en subir les conséquences malheureusement » déplorait-elle après son audition.
Son sentiment est largement partagé par les personnes concernées, dont Imane Maarifi qui confie, elle aussi à Anadolu, qu’elle sait qu’il doit y avoir « des dommages collatéraux » dans ce combat pour la Palestine.
« J’ai bien peur d’être un de ces dommages mais en même temps je me dis qu’il en faut. Pour arriver à tout ça il en faut et si je dois l’être ce sera un honneur. Je ne me tairai pas, je continuerai de ne refuser ni interview, ni prise de parole, ni conférence, quand je témoigne factuellement de ce que j’ai fait (à Gaza). Je suis un témoin de moralité et c’est avec toute mon éthique que je me dois de témoigner. Personne ne me fera taire et ne me fera reculer sur ça » promettait la jeune femme en début de semaine.
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