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Les élections du 23 juillet en Espagne : Pour la défense des droits et des libertés démocratiques

mardi 8 août 2023 par Hojas de Debate

Une analyse des élections espagnoles de nos camarades espagnols de Hojas de Debate.

Le fascisme est déjà présent dans les rues et dans les institutions de notre pays. La presse réactionnaire, la classe dirigeante, les porte-paroles à son service, contribuent à sa « normalisation ». Ils en ont recours pour empêcher les luttes populaires qui devraient frayer la voie aux grandes transformations sociales progressives.

Le 23 juillet les démocrates de notre pays ont réussi à porter un coup de frein au fascisme. Le bloc réactionnaire n’a pas atteint la majorité d’au moins 176 députés qu’il prévoyait d’obtenir pour accéder au gouvernement, et de là, par le biais de lois organiques, vider de contenu les droits et libertés démocratiques inscrits – avec des limites importantes – dans la Constitution de 1978.

Rappelons que celle-ci fut le produit non pas d’un processus constituant républicain, mais d’un pacte signé avec le franquisme par certaines organisations de l’opposition à la dictature. À coup sûr, si la droite réactionnaire avait obtenu la majorité absolue, elle aurait fait un pas important dans le sens de nous imposer une « dictature douce » et de nous rapprocher dangereusement du franquisme.

Sans aucun doute, la défaite du bloc réactionnaire aux élections législatives constitue une victoire populaire de premier ordre que nous tous saluons. Mais ce n’est qu’un premier mouvement dans la bataille indispensable et pleinement légitime pour vaincre ceux qui veulent ramener l’Espagne au passé de la dictature pure et dure.

Le fascisme est déjà présent dans les rues et dans les institutions de notre pays. La presse réactionnaire, la classe dirigeante, les porte-paroles à son service, contribuent à sa « normalisation ». Ils en ont recours pour empêcher les luttes populaires qui devraient frayer la voie aux grandes transformations sociales progressives.
Celles-ci ne sont authentiques que dans la mesure où les droits conquis par la majorité sociale correspondent proportionnellement aux privilèges perdus par la minorité qui accumule les plus-values générées par le travail salarié et qui élude l’impôt dans les paradis fiscaux.

La même qui contrôle et dirige l’économie par des mécanismes dictatoriaux, sans autre objectif que de préserver et d’accroître ses profits. Celle qui détruit notre planète, qui précarise et appauvrit jusqu’aux limites de la misère à des nombreux travailleurs indépendants et des larges couches populaires, et qui promeut par ses dessins impérialistes des guerres cruelles.

Cette importante victoire populaire dans les urnes ne doit cependant pas nous faire renoncer à une analyse sérieuse des résultats électoraux et des programmes portés les organisations qui composent le bloc social-démocrate et ont soutenu le gouvernement de coalition sortant présidé par M. Pedro Sanchez (PSOE).

Pour l’instant, l’extrême droite commandée par Abascal a perdu plus de 600 000 voix et pas moins de 19 sièges par rapport aux résultats de 2019, et le bloc réactionnaire se retrouve sans les 176 députés qu’il poursuivait.

La participation électorale a augmenté de quatre points par rapport aux élections législatives précédentes, très proche de 71%, et l’abstention touche deux millions et demi d’électeurs de moins qu’alors.
Le PSOE avec 7 682 337 voix récupère près d’un million de voix, mais n’augmente qu’en deux le nombre de ses députés élus. Et « Sumar », la nouvelle marque conduite par l’actuelle vice-présidente Yolanda Diaz, enregistre une perte de sept députés par rapport à ceux que Podemos et ses alliés avaient obtenus en 2019.

La baisse des soutiens de cette « gauche à la gauche du PSOE » se poursuit élection après élection, un fait qui exige un examen rigoureux. Recompositions et changements de noms mis à part, elle est passée de 71 sièges parlementaires en 2016 à 42 lors des premières élections de 2019. Puis à 38 députés dans leur répétition de la même année, et maintenant à 31 en 2023.

Quelles sont les causes d’une telle évolution ?

Pourquoi ses dirigeants n’expliquent-ils pas cette débâcle et insistent-ils, au contraire, à se féliciter du « succès » qu’ils prétendent avoir réussi ?
Une baisse d’une telle ampleur, n’a-t-elle rien à voir avec leur renoncement à toute autonomie face à l’orientation belliciste, néolibérale et pro-impérialiste du PSOE aux commandes du gouvernement, incapable de promouvoir des mesures plus ambitieuses que celles qu’il a adopté pour améliorer le sort de la majorité sociale, arrachant des privilèges à la classe dirigeante ?

N’est-il pas plus vrai que l’attachement d’Unidas Podemos à ce gouvernement de coalition l’a empêché d’œuvrer pour une mobilisation populaire sans laquelle il est impossible d’imposer des mesures telles que l’abrogation de la « loi bâillon », l’abolition complète de la réforme du travail des précédents gouvernements (du PP et du PSOE) et d’autres objectifs importants qui figuraient dans l’accord de coalition de décembre 2019 et qui ont été abandonnés ?

La lutte, aussi bien dans les institutions que dans la rue, n’est-elle pas la seule voie qui peut modifier le rapport de forces en faveur des couches populaires ?

Certains, à l’instar des vieux maîtres du PSOE Felipe Gonzalez et Alfonso Guerra, peut-être pas peu nombreux dans les rangs dirigeants de la social-démocratie, appellent à la « centralité » pour permettre au bloc réactionnaire de gouverner avec l’abstention des députés du PSOE.
Des « barons » régionaux de ce parti parient sur cette « solution » et ils sont bien connus de nos concitoyens. Ou bien ils songent à un gouvernement de « grande coalition » PP-PSOE, chéri par le grand capital, pour appliquer les réformes draconiennes exigées par l’UE.

Ainsi une aggravation des pires aspects d’une législation du travail toujours marquée par bien des impositions régressives des réformes précédentes qui n’ont pas été éliminées par le gouvernement PSOE-UP. Ou l’accélération de la privatisation des retraites et le report à 72 ans de l’âge de départ d’activité !
De même que la privatisation de ce qui reste des services publics essentiels, comme le système de santé, et l’attribution de sommes faramineuses des dépenses publiques aux budgets de guerre au détriment des intérêts et des besoins urgents de la majorité sociale, etc.

En dépit des difficultés qu’elle comporte, une possibilité existe pour le bloc social-démocrate de former un gouvernement en comptant sur quelque type de soutien des nationalismes dits périphériques, en y comprenant les droites nationalistes catalane et basque. Mais l’hypothèse d’une répétition électorale ne peut absolument pas être exclue.

Mais il ne suffit pas d’analyser les résultats des élections. Il est également nécessaire d’étudier les programmes politiques avec lesquels « Sumar » et le PSOE ont concouru aux élections. Tous deux sont d’accord sur l’application de politiques économiques néolibérales qui ne remettent pas en cause les intérêts de la classe dirigeante, de cette minorité qui passe au-dessus de la majorité sociale.

Ils en adoucissent les effets avec des mesures que nous considérons comme positives (augmentation du Smic, indexation des retraites sur l’évolution des prix et autres), mais qui restent largement insuffisantes pour contrecarrer l’inflation induite par les budgets de guerre et les exigences du capital financier, ainsi que de toutes celles qui nous viennent des institutions bruxelloises, soumises à l’impérialisme et que les programmes électoraux du bloc social-démocrate ne contestent pas.

De même qu’ils font à propos de la permanence de l’Espagne dans l’OTAN et des politiques pyromanes qui répandent de l’essence dans la poudrière de l’Ukraine, augmentant de ce fait les risques d’élargissement à l’ensemble du continent européen, voire de notre planète, au lieu d’élever la voix en défense de la paix, pour le cessez-le-feu immédiat, l’ouverture de négociations et l’envoi de diplomates et d’experts en droit international au lieu d’armes.

Ils ne font non plus la moindre mention du fait que lors du référendum du 31 janvier 1986, le peuple souverain avait décidé que « la participation de l’Espagne à l’Alliance atlantique n’inclura pas son incorporation dans la structure militaire intégrée ».

On a le droit de se demander si, avec ce genre de programmes électoraux, ne contribue-t-on pas à ce qu’une partie de la majorité populaire, par pur désespoir, continue de s’abstenir ou de livrer ses votes au bloc réactionnaire, en cas – pas du tout improbable – de répétition des élections ?

Éventuellement, parviendrait-on avec de telles cartes à atteindre le minimum de 75% de participation électorale qui apparaît comme condition essentielle pour renforcer les chances de barrer la route au fascisme et former un gouvernement de progrès qui soit vraiment celui de la majorité sociale ?

Le format utilisé dans la campagne électorale mérite également réflexion.

Le fascisme doit être vaincu quelle que soit l’issue de la situation politique fort menaçante dans laquelle nous nous trouvons. N’est-il pas strictement indispensable, pour atteindre une démocratie digne de ce nom, approfondie, républicaine et populaire, d’œuvrer à un retour au face-à-face, à la rue, aux usines et autres centres de travail, et à la mobilisation dans les espaces publics, à l’unité et à l’organisation de la majorité sociale, échappant au « piège de la diversité » et promouvant l’unification des luttes sociales et économiques dans une perspective de classe ?

Les téléphones portables et les réseaux sociaux suffisent-ils à eux seuls à protéger les droits et les libertés démocratiques et à nous faire avancer vers les transformations sociales progressives ?
La prise de conscience et l’organisation de classe, l’enthousiasme contagieux et une volonté politique ferme ne sont-ils pas possibles si nous revenons à la rencontre personnelle, à la saisie des espaces publics, au bouche à oreille, au mégaphone, aux tracts, au plein exercice de tous les droits et libertés démocratiques sur nos places publiques ?

Une mobilisation sociale systématique en défense de la démocratie, qui ne l’est pas vraiment, insistons-nous, que si elle est républicaine, n’est-elle pas inséparablement liée à la défense ferme et déterminée des intérêts de la majorité sociale, à commencer par les plus urgents, dans le plein développement du syndicalisme de classe et de combat et la lutte indispensable pour la paix ?

L’espèce humaine est grégaire. N’oublions jamais l’hymne mondial des travailleurs : Groupons-nous et demain l’Internationale sera le genre humain !

Source : Hojas de Debate, 27 juillet 2023 < https://hojasdebate.es/destacado/en-defensa-de-los-derechos-y-libertades-democraticas/>

MIGUEL MEDINA FERNANDEZ-ACEITUNO, avocat spécialiste en droit du travail
MIGUEL SAGASETA, ingénieur

   

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