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Histoire de la Fédération Syndicale Mondiale (FSM)

dimanche 25 août 2024 par FNIC-CGT/Alain Marshal

Retranscription intégrale d’une vidéo de la Fédération nationale des industries chimiques (FNIC-CGT) sur la Fédération Syndicale Mondiale (FSM / WFTU), son histoire et son actualité. Réalisation, montage et commentaire par Michel Le Thomas.

Les révoltes en Europe et l’émergence du syndicalisme international

Après l’impérialiste et sanglante épopée napoléonienne, les peuples d’Europe se lèvent en 1830 et en 1848. La révolution de 1848 est sans aucun doute le premier soulèvement de la classe ouvrière en tant que force tentant de s’organiser. La bourgeoisie va réprimer dans le sang ces révoltes et montrer le vrai visage d’un capitalisme haineux, meurtrier, exploiteur, raciste, brisant toute résistance à son développement au prix de milliers de morts. Ce capitalisme sans frontières exploite les peuples partout où il s’est développé, et les émeutes apparaissent partout en Europe, faisant prendre conscience de la nécessité de s’organiser au-delà des frontières nationales.

Mais c’est à cette époque que des organisations de travailleurs naissent et grandissent. La rédaction par Marx et Engels du Manifeste du Parti Communiste marque et impulse la clairvoyance du prolétariat à devoir s’organiser au niveau international : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » Dès la Première Internationale, créée en 1864, à l’initiative là encore de Marx et Engels, il apparaît que l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Les luttes fondamentales et fondatrices se développent alors : pour l’instauration du suffrage universel, pour la réduction de la durée du travail, pour la disparition de celui des enfants. À la fin du XIXe siècle en Europe, l’âge minimal pour le travail des enfants est encore de 14 ans en Suisse, 12 ans en Allemagne, aux Pays-Bas et en France, 11 ans au Royaume-Uni, 10 ans au Danemark, et 9 ans en Italie. En France, c’est par la loi du 2 novembre 1892 que la durée maximale de travail est ramenée à 10 heures quotidiennes à 13 ans, et à 60 heures hebdomadaires entre 16 et 18 ans.

Répression et création des Internationales syndicales

La bourgeoisie, devant le prolétariat qui s’organise, s’inquiète. Elle laissera libre cours à sa rage et à sa colère lors du massacre du peuple parisien organisé en Commune : entre 20 000 et 30 000 morts, 38 000 fugitifs exilés, et autant d’arrestations dont 78 % d’ouvriers. Ce bain de sang amènera à l’élaboration du concept de dictature du prolétariat et amènera aussi, en 1889, à l’initiative d’Engels et des partis socialistes et ouvriers d’Europe, à la fondation de la Deuxième Internationale, qui groupera partis et syndicats. C’est lors de son Congrès fondateur à Paris que fut décidée l’organisation de la première manifestation internationale le 1er mai 1890 pour l’obtention de la journée de huit heures.

En 1901, est créé le Secrétariat Syndical International, qui se transformera en Fédération Syndicale Internationale (FSI), celle-ci intégrant en 1913 les 32 secrétariats professionnels internationaux. À partir de 1904, des débats se font jour entre réformistes et révolutionnaires, qui aboutiront en 1914 à la trahison pure et simple des orientations de la FSI, à la collaboration à l’Union sacrée et finalement à la guerre impérialiste opposant les peuples entre eux.

La Troisième Internationale est mise en place en 1919, suite à la révolution bolchevique et justement contre la trahison des dirigeants de la Deuxième Internationale. Cela provoquera des scissions dans les organisations syndicales, dont la France, sur les questions d’orientation des mouvements ouvriers, réformisme ou révolution. L’Internationale Syndicale Rouge (ISR), ou Profinterm, est créée en 1921 par la condamnation du réformisme de la FSI, dite maintenant Fédération d’Amsterdam. Véritable internationale des syndicats jaunes, celle-ci refuse tout contact avec l’ISR. Si des liens se nouent pourtant au niveau des syndicats professionnels internationaux, il faudra attendre 1935 pour que des démarches d’unité se mettent en place.

La création de la FSM et la Guerre Froide

Après l’arrivée d’Hitler au pouvoir, l’Internationale Syndicale Rouge, à la suite de l’Internationale Communiste, change de tactique et propose le 7 mars 1935 une conférence commune avec la Fédération Syndicale Internationale (Fédération d’Amsterdam) pour rétablir l’unité. Mais avant même que cette unité soit finalisée, des centrales rouges ont déjà intégré les centrales de la FSI, comme la Confédération Générale du Travail Unitaire en France qui fusionne avec la Confédération Générale du Travail. Devant cette situation, l’Internationale Syndicale Rouge se dissout à la fin de 1937. Et puis ce fut le conflit : éclair à l’ouest de l’Europe, destruction pour les Londoniens, et surtout terriblement coûteux en vies humaines sur le front de l’est de juin 1941 à mai 1945.

Durant ces deux périodes, une commission syndicale anglo-soviétique se réunit, ce qui permettra la création de la Fédération Syndicale Mondiale (FSM). Mais ce sont deux événements qui aboutiront à la réelle mise en place de la FSM : la conférence de Londres du 6 au 17 février 1945, rassemblant 55 organisations syndicales, puis le Congrès de Paris du 3 au 8 octobre 1945. Walter Citrine, ancien président de la réformiste FSI (dite Fédération d’Amsterdam) et Secrétaire général de la Trades Union Congress de Grande-Bretagne, en prendra la direction, tandis que Léon Jouhaux en sera l’un des vice-présidents et Louis Saillant, le Secrétaire général.

FSM et CISL : deux orientations syndicales opposées

Les objectifs de cette nouvelle Fédération mondiale sont clairement établis : préservation de la paix, lutte contre les régimes fascistes, et participation du syndicalisme à la fondation de l’ONU. Malheureusement, la FSM ne sera pas associée à la création de cette organisation internationale. Et puis surtout, se mettent en place en 1947, aux États-Unis, deux orientations aux conséquences considérables : le Plan Marshall et la doctrine anti-communiste de Harry Truman.

En mars 1948, la Fédération Étasunienne du Travail (AFL) et son représentant en France, Eisenbraun, agent de la CIA, organisent une conférence rassemblant les organisations soutenant le Plan Marshall. En décembre 1949, est ainsi créée la Confédération Internationale des Syndicats Libres (CISL), dont Harry Brown désigne l’ennemi prioritaire : le totalitarisme soviétique. Léon Jouhaux est le vice-président de cette organisation à l’anti-communisme affirmé.

Dès cette période de tensions internationales, seront présentes et actives deux fédérations syndicales mondiales, deux lignes de conduite opposées : la CISL, ouvertement anti-communiste et financée par les États-Unis via la CIA, fédère les syndicats de collaboration de classe, Léon Jouhaux y réaffirmant le caractère co-gestionnaire du syndicalisme, tandis que la FSM accueille les syndicats des pays socialistes, les organisations progressistes de classe des pays développés comme la CGT en France, les mouvements de libération nationale et les syndicats des pays en lutte contre le colonialisme. Un exemple de ces différentes attitudes face aux bouleversements du monde : alors que, du 10 au 13 avril 1947, la FSM avait choisi Dakar pour abriter la première conférence panafricaine des syndicats, la CISL, elle, lors de la création de la Confédération Syndicale Africaine, se réunit en présence des ambassadeurs de Grande-Bretagne et des États-Unis, ce qui a entraîné la désaffiliation à la CISL de l’Algérie, du Maroc, du Ghana et du Kenya.

Cela a en réaction aussitôt incité la CISL, là encore sous la direction de l’agent de la CIA Eisenbraun, à créer de puissants instituts de formation par lesquels l’AFL-CIO [née de la fusion en 1955 de l’AFL et du Congrès des Organisations Industrielles] a soutenu sans relâche l’anti-communisme dans le Tiers monde. Plusieurs syndicats du Tiers monde sont ainsi de purs produits de l’AFL-CIO, surtout dans le sud-est asiatique et en Amérique latine. Plusieurs d’entre eux sont devenus des syndicats gouvernementaux officiels et des piliers des régimes pro-américains. L’Institut AIFLD (American Institute for Free Labor Development), par exemple, opère officiellement en Amérique latine depuis 1961, et le gouvernement américain lui accorde environ 10 millions de dollars par an pour assurer son fonctionnement, en plus des dons offerts par les patrons des grandes entreprises américaines. Cet institut y a combattu les régimes progressistes en créant ou en soutenant des syndicats qui y étaient opposés, préparant ainsi le terrain pour les coups d’État de la CIA, entre autres au Guatemala en 1954, au Brésil en 1964, et au Chili en 1973. La CISL a également soutenu la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier en Europe, puis a participé puissamment à la création de la Communauté Européenne.

Voir Jean-Pierre Page : à Gaza, la CGT a renoncé à l’internationalisme

Quant à la FSM, sous la direction de Louis Saillant puis de Pierre-Jean Saux, elle a tout de suite cherché à rassembler ses syndicats autour d’une base de classe et de masse, contre l’impérialisme, avec une perspective révolutionnaire clairement affirmée d’abolition de l’exploitation capitaliste. Ses priorités ont immédiatement été établies : la lutte pour la paix, les droits démocratiques des peuples et l’unité syndicale internationale. La FSM et ses affiliés ont activement soutenu les mouvements de libération nationale ainsi que les luttes contre les dictatures militaires et fascistes. Le mouvement syndical mondial a apporté une aide active à l’organisation du processus dans les pays qui venaient d’accéder à l’indépendance. La FSM participe ainsi en 1969 à la première conférence d’Alger sur les questions pétrolières et a également créé des Unions Internationales des Syndicats (UIS) pour organiser les activités dans différentes branches professionnelles.

La FSM est à ce titre signataire, dans le cadre de l’UIS Chimie Énergie, de la Charte de Tarnow, regroupant les revendications concernant l’amélioration des conditions de travail dans ce secteur industriel. La FSM travaille aussi pour l’interdiction des armes chimiques, avec par exemple une intervention à l’ONU en séance plénière.

La fin de l’URSS et les défis contemporains de la FSM

Mais dans les années 1990, avec la fin de l’URSS et l’offensive du capitalisme international, la FSM perd nombre d’adhérents et d’organisations, dont la CGT française. Depuis l’élection de la nouvelle direction lors du Congrès de La Havane en 2005, le déclin semble être arrêté. Les références à la lutte des classes sont de nouveau dans les Statuts, et la FSM continue de chercher à rassembler ses syndicats autour d’une base de classe et de masse, contre l’impérialisme, avec une perspective révolutionnaire clairement affirmée d’abolition de l’exploitation capitaliste.

En parallèle, la CISL, appelée aujourd’hui Confédération Syndicale Internationale (CSI), est hier comme aujourd’hui engagée dans la collaboration de classe. Sa branche européenne, la CES (Confédération européenne des Syndicats), hier dirigée par Luca Visentini et aujourd’hui par Laurent Berger, patron de la CFDT, accompagner toutes les régressions sociales des 20 dernières années.

Actuellement, la FSM représente environ 100 millions de membres dans 126 pays. Pour ne citer que quelques-uns des syndicats des pays dits du Tiers monde qui y sont affiliés, on trouve, en Amérique latine, la Centrale des Travailleurs Cubains, la Centrale Ouvrière Bolivienne, la CTB et la CGC du Brésil, la CGT du Pérou, les syndicats dits bolivariens du Venezuela. En Afrique, le syndicat COSATU, pilier syndical de la Triple Alliance ANC – Parti Communiste – COSATU, qui a mené la lutte victorieuse pour la fin du régime d’apartheid. Au Moyen-Orient, citons le syndicat DISK en Turquie, la CGTL au Liban, et l’UGTP en Palestine. La FSM rassemble aussi des forces syndicales en Inde, au Vietnam, en Malaisie, au Bangladesh, au Sri Lanka, en Indonésie, ainsi qu’en Corée du Nord et du Sud.

La FSM connaît également une certaine réimplantation, modeste mais réelle, dans les pays industriels de l’Europe de l’Ouest. Au Royaume-Uni, par exemple, le syndicat des travailleurs du transport maritime (RMTU), fort de 80 000 adhérents, a demandé son adhésion à la FSM en juin 2013. En Italie, le syndicat de classe et de combat, l’Union des Syndicats de Base, fort de 250 000 adhérents et ayant un poids certain dans plusieurs secteurs de l’économie italienne, notamment dans les transports, a rejoint la FSM, tout comme le syndicat catalan Intersindical CSC, le syndicat LAB au Pays basque, et le PAME en Grèce.

France : l’engagement renouvelé de la CGT

En France, on note un regain d’intérêt pour la FSM dans plusieurs organisations de la CGT (Fédérations, Unions départementales, syndicats). La Fédération Nationale des Industries Chimiques CGT s’est affiliée à la FSM en 2014. La Fédération de l’Agroalimentaire CGT y a maintenu son affiliation, et la Fédération CGT du Commerce et des Services a adhéré à la FSM en 2019. Les syndicats de cheminots CGT en région parisienne ont entamé des rapprochements avec la FSM depuis 2013. Parmi ceux-ci, le syndicat CGT des cheminots de Versailles a formellement adhéré à la FSM en 2014,. La CGT Énergie Paris est adhérente à la FSM. L’e COngrès de l’Union départementale du Val-de-Marne en 2018 décide aussi d’entreprendre des rapprochements avec la FSM. La CGTM, syndicat majoritaire en Martinique depuis la création des syndicats, est une confédération qui regroupe 39 syndicats aux chambres syndicales, et elle est adhérente à la FSM. De même, la puissante Union Départementale CGT des Bouches-du-Rhône a formellement adhéré à la FSM en juin 2019.

Plusieurs dizaines de syndicats CGT dans différents champs professionnels ont adhéré à la FSM ces dernières années. Notons enfin qu’en 2019, le Congrès de la CGT à Dijon a voté un amendement au document d’orientation qui réintègre la FSM parmi les organisations citées avec lesquelles la CGT peut rechercher des possibilités de collaboration syndicale. C’est une première depuis le départ de la CGT de la FSM.

Ainsi, la Fédération Syndicale Mondiale construit l’avenir avec pour maîtres mots : Actions, Unité, Démocratie, Solidarité. Cette solidarité s’est exprimée de façon exemplaire avec le peuple français dans sa lutte contre les orientations libérales de la bourgeoisie de ce pays [photos de manifestations de soutien en Grèce, au Chili, en Colombie, au Danemark, en Corée du Sud, en Equateur, en Espagne, aux Etats-Unis, en Indonésie, au Maroc, au Kazakhstan, au Mexique, à Monaco, en Palestine, au Panama, en République dominicaine, en Somalie…].

Conclusion

La FSM œuvre à réunir les forces de la classe ouvrière et tous les salariés dans la lutte des classes, indépendamment de leur idéologie, religion, langue ou sexe. Elle encourage et organise les gens du peuple dans la lutte contre l’exploitation capitaliste et contre l’impérialisme. La FSM réaffirme sa foi dans le rôle émancipateur des travailleurs pour un monde sans exploitation, sans guerre, sans pauvreté, sans prostitution ni exploitation infantile, un monde débarrassé du capitalisme mortifère pour l’homme et la planète.
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Voir en ligne : https://alainmarshal.org/2024/08/25...

   

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