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Un soldat israélien visé par un mandat d’arrêt lors de vacances au Brésil

lundi 6 janvier 2025 par Justine Brabant

Suspecté de crimes de guerre commis à Gaza, il a cependant pu quitter le pays avant d’être arrêté. Les poursuites à l’étranger de ses soldats sont un sujet d’inquiétude pour Israël, en même temps qu’un maigre espoir pour celles et ceux qui veulent mettre fin aux massacres à Gaza.

Une cour de justice brésilienne a ordonné à la police fédérale d’ouvrir une enquête sur un réserviste israélien qui voyageait dans le pays, en raison de soupçons de crimes de guerre commis à Gaza, a annoncé samedi 4 janvier la presse brésilienne.

Cette décision de justice est une première. Rendue le 30 décembre, elle fait suite à une plainte déposée au Brésil, une semaine plus tôt, par la Fondation Hind Rajab, une fondation basée en Belgique s’étant donné pour but de « mener des actions en justice » contre les auteurs de crimes à Gaza. Le nom de l’organisation est un hommage à Hind Rajab, une fillette palestinienne de 6 ans tuée par l’armée israélienne dans l’enclave le 29 janvier 2024.

La fondation a remis à la justice brésilienne un dossier de plus de 500 pages contenant, selon le portail d’actualités brésilien Metropoles qui a pu le consulter, des preuves collectées en sources ouvertes. Ces documents visent à prouver l’implication du soldat dans plusieurs crimes, dont la démolition à l’explosif d’un immeuble résidentiel de Gaza, hors de tout contexte de combat.

« Les preuves contiennent des séquences vidéo, des données de géolocalisation et des photographies montrant le suspect en train de poser lui-même des explosifs et participer à la destruction de quartiers entiers », détaille la fondation dans un communiqué. Des familles dont les maisons ont été détruites se seraient jointes à la procédure en tant que plaignantes.
« C’est un moment historique », qui « crée un précédent important pour que les criminels de guerre rendent des comptes » a estimé Dyab Abou Jahjah, président de la fondation, en réaction à la décision brésilienne.

Selon la presse israélienne, le soldat concerné, Yuval V., serait un survivant du massacre sur le site du festival Nova Tribe, où le Hamas a assassiné 383 personnes le 7 octobre 2023. Sa famille a indiqué au un média israélien Ynet qu’il avait pu quitter le Brésil avant d’être arrêté. Le soldat aurait reçu au cours du week-end un appel du consulat d’Israël l’informant qu’il était visé par un mandat d’arrêt, suite à quoi le militaire aurait immédiatement quitté le pays, accompagné d’un ami qui voyageait avec lui.

« Obstruction à la justice »

Le ministère des affaires étrangères israélien a confirmé avoir « contacté le soldat et sa famille » et l’avoir « accompagné (…) jusqu’à son départ rapide et sûr du Brésil ». La Fondation Hind Rajab, une fois confirmé que le soldat était parvenu à quitter le pays, a dénoncé une « obstruction à la justice ».

La commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset, le parlement israélien, a annoncé la tenue en urgence d’une réunion, lundi 6 janvier, à propos de « la protection des soldats israéliens contre les poursuites judiciaires à l’étranger ».
Le mois dernier, l’armée israélienne aurait « déconseillé à des dizaines de soldats de voyager à l’étranger » après qu’une « trentaine » d’entre eux, ayant combattu à Gaza, « ont fait l’objet de plaintes pour crimes de guerre », rapporte le Times of Israel ce dimanche 5 janvier.

Les possibles poursuites à l’étranger de soldats ayant pris part aux opérations de l’armée israélienne à Gaza sont un sujet d’inquiétude pour les autorités de Tel-Aviv, en même temps qu’un maigre espoir pour celles et ceux qui cherchent des voies légales pour alerter en tenter d’empêcher sur ce qui est considéré par de plus en plus de juristes et d’humanitaires comme un génocide.
La Fondation Hind Rajab a déclaré en novembre avoir transmis à la Cour pénale internationale une liste d’un millier de soldats ayant pris part à de possibles crimes de guerre à Gaza, établie sur la base de photos et vidéos réalisées par ces soldats eux-mêmes lors de leur déploiement dans l’enclave.

Les chances que ces requêtes concernant des soldats peu ou pas gradés aboutissent rapidement devant la CPI, alors que les juges de la Cour ont mis des mois avant d’émettre les mandats d’arrêt demandés par le procureur Karim Khan visant les plus hauts responsables israéliens, le premier ministre Benyamin Nétanyahou et son ancien ministre de la défense Yoav Gallant, sont considérées comme relativement faibles par les juristes.

Plainte en France

Mais cette procédure au Brésil rappelle que les soldats israéliens peuvent être rattrapés par la justice par d’autres voies. Des juridictions étrangères peuvent en effet prendre l’initiative de se saisir de noms de soldats israéliens ayant des liens avec leur pays – binationaux, étudiants sur place, touristes de passage – pour les poursuivre.

En France, plusieurs organisations, dont la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), ont déposé, le 17 décembre, une plainte avec constitution de partie civile auprès du pôle « Crimes contre l’humanité » du tribunal judiciaire de Paris à l’encontre d’un soldat Franco-Israélien ayant servi à Gaza.

Pour demander l’ouverture d’une enquête pour « crimes de guerre, crimes contre l’humanité, génocide, torture et complicité de ces crimes », ils s’appuient sur plusieurs vidéos publiées sur les réseaux sociaux, où l’on voit des soldats israéliens, s’exprimant en français, se vantant d’avoir torturé des détenus palestiniens. Dans ces vidéos, dont Mediapart avait fait état en mars 2024, des prisonniers palestiniens apparaissent yeux bandés, mains attachées, pour certains blessés, et sont copieusement insultés par leurs geôliers.

Mais la binationalité n’est pas forcément le seul cas permettant d’ouvrir des enquêtes. Le simple fait de se trouver sur le territoire d’un État peut ouvrir la voie à des poursuites dans cet État, en vertu du principe de compétence universelle.

C’est la raison pour laquelle des activistes et juristes suivent attentivement les comptes sur les réseaux sociaux de soldats israéliens soupçonnés de crimes de guerre, guettant tout déplacement à l’étranger qui pourrait ouvrir la voie à de possibles arrestations et poursuites judiciaires dans les pays concernés. La Fondation Hind Rajab a ainsi appelé les autorités thaïlandaises, argentines, chiliennes et sri lankaises à arrêter des soldats israéliens en voyage dans leurs pays, affirmant là encore détenir des preuves de crimes commis à Gaza.

« Il est conseillé aux soldats qui prévoient de voyager à l’étranger de ne poster aucune image qui permettrait de les localiser », conseillait par conséquent le quotidien conservateur israélien Times of Israël, suite aux poursuites entamées au Brésil.

L’un des principaux opposants au gouvernement de Benyamin Nétanyahou, Yaïr Lapid, a dénoncé un « échec colossal » de la part d’Israël dans ce dossier, accusé de n’avoir pas su protéger correctement ses soldats. Sans évoquer la question des crimes de guerre commis dans l’enclave palestinienne.

Médiapart du 05 janvier 2025

   

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