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Haïti et Afrique : les dettes odieuses imposées par la France
vendredi 27 mai 2022 par Afrique XXI
Le week-end dernier, une longue enquête sur la « dette de l’indépendance » haïtienne a fait la une du New York Times, avec de nombreuses reprises dans la presse internationale. L’histoire est bien connue des universitaires, moins du grand public.
En 1825, une escadrille de guerre française envoyée par Charles X s’avance dans le port de Port-au-Prince et menace : la jeune nation, qui a arraché son indépendance en 1804 après une révolte d’esclaves, doit indemniser les anciens colons pour 150 millions de francs or, ou c’est la guerre.
Haïti n’a pas le choix, s’incline et s’endette pour s’acquitter de la somme. L’équipe du New York Times a passé treize mois à éplucher les registres de comptes, pour documenter le rôle des banques françaises, en particulier celui du Crédit Industriel et Commercial (CIC), et calculer le montant – vertigineux ! – des réparations versées à la France, qui vont peser sur les finances haïtiennes pendant des décennies : 560 millions de dollars en valeur actualisée.
Des générations de descendants d’esclaves se sont ainsi saignées pour indemniser les héritiers de leurs anciens maîtres. Cette dette, c’est ni plus ni moins qu’une « rançon », estime le New York Times, qui rappelle que « la France n’a toujours fait que la minimiser, la déformer, si ce n’est la gommer des mémoires ».
L’exemple haïtien ne fait malheureusement pas exception.
Paris a toujours refusé de reconnaître ses responsabilités, aux côtés d’autres créanciers, dans l’accumulation des dettes odieuses africaines, notamment celles de l’ex-Zaïre de Mobutu – fin 1999, la France détenait encore 1,6 milliards d’euros de créances sur la jeune République démocratique du Congo, pour l’essentiel héritées de la période Mobutu – du Tchad d’Hissène Habré, du Mali de Moussa Traoré ou encore du Congo de Denis Sassou-Nguesso. Comme pour Haïti, ces dettes odieuses génèrent elles-mêmes de nouvelles dettes au gré des rééchelonnements, des capitalisations d’intérêts et des nouveaux emprunts contractés pour rembourser les précédents. Et ce sont les peuples qui en paient le prix fort. Pendant des décennies.