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À propos des évènements du Kazakhstan...suite
samedi 8 janvier 2022 par Bruno Drewski (ANC)
Il est intéressant de constater qu’il semble que le KPRF, à la suite des communistes kazakhstanais, soutient grosso modo les manifestations et émeutes au Kazakhstan, alors que le PC ukrainien, délégalisé comme celui du Kazakstan, semble analyser les événements là-bas sur le mode "maidan" (BD-ANC) :
Le renversement du pouvoir au Kazakhstan a été confié à un oligarque fugitif
Décidemment la FRANCE et le Royaume uni sont moins regardants sur les réfugiés oligarques que sur Assange, ceci expliquant cela nous avons une presse infiniment plus apte à prendre le relais des révolutions de couleur que ces gens-là organisent qu’à s’intéresser à l’ignominie accomplie contre Assange, aux luttes pour le pouvoir d’achat, pour le service public. Mais lisez plutôt cet article du PARTI COMMUNISTE UKRAINIEN qui dans le domaine des révolutions de couleur fomentées au nom du peuple par des oligarques nazis sait jusqu’où l’occident, l’EUROPE et les USA peuvent aller. Il n’en demeure pas moins que l’on peut plaindre des peuples qui n’ont que pareils salauds et escrocs pour dire leurs revendications et leurs difficultés à vivre, mais il est clair que le peuple français n’est pas mieux loti… (note de Danielle BLEITRACH traduction de MARIANNE DUNLOP pour histoire et société)
Lire aussi : Maïdan ou révolte sociale au Kazakhstan ?Le point avec Sergeï Kozhemyakin correspondant de La Pravda en Asie Centrale.
Bruno Dreweski
C’est intéressant car on peut se poser la question si cette position des communistes russes vient de leur propre analyse ou ne converge pas avec quelque chose de plus large en Russie et au Kazakhstan ?
Pour ce qui est des thèses "complotistes" (un terme stigmatisant inventé par la CIA à l’occasion du "complot" Kennedy, cela a été documenté), je ne suis jamais partisan de la thèse d’une histoire explicable par des complots, car les complots n’ont de sens que lorsqu’ils répondent à une tendance objective appuyée sur une base matérielle conséquente, aussi bien dans les classes dominées que dominantes.
Mais l’histoire humaine, ce sont principalement deux choses :
- 1/des mouvements de masse et
- 2/des intrigues au sommet (ou "complots").
Quand les masses sont en mouvement, les complots sont soit affaiblis soit subalternes par rapport au mouvement de masse (le complot des Allemands envoyant Lenine en Russie en 1917 par exemple), mais quand les masses sont rendues passives, alors la vie politique se réduit de plus en plus à des intrigues entre élites, des intrigues de cour, et qu’on peut tout aussi bien appeler des complots.
Complots éventuellement utilisant les masses dans leurs intérêts. L’histoire humaine c’est donc une dialectique mouvement de masse/ cercles d’élites. Et les deux sont toujours présents mais dans des proportions variables. L’histoire est multifactorielle même si au final ce sont toujours les masses qui sont en position d’arbitre ...par leurs activité ...ou par leur passivité.
Côté "complot" kazakh, nous avons maintenant une liste d’oligarques ou proches d’oligarques kazakhs soupçonnés par les uns ou par les autres de financer et d’armer les émeutiers violents.
Car l’armurerie du KGB local à Almaty a bien été ouverte aux manifestants ce qui laisse entendre selon certains que par exemple Nazarbaïev et son clan d’oligarques l’aurait fait pour provoquer la chute de son successeur devenu trop indépendant.
Et ce qui expliquerait pourquoi Nazarbaiev vient d’être limogé de son poste de président du Conseil de sécurité au profit de Tokaiev son dauphin mais peut-être désormais rival.
Bref on a plusieurs thèses de comploteurs :
- - les oligarques pro- nazarbaiev
- - les oligarques anti-nazarbaiev
- - un oligarque réfugié en Ukraine depuis le Maidan
- - un oligarque réfugié politique en France mais poursuivi en Russie et en Angleterre
- - des oligarques à Londres
- - le MI6 en coopération avec Zelensky, lui-même éventuellement en accord avec Erdogan
- - les Russes pour gêner la mainmise des entreprises occidentales sur l’énergie kazakhstanaise. [1]
Toutes ces pistes sont bien sûr contradictoires et elles ne sont de toute façon possibles que si l’on tient compte du mécontentement fortement répandu dans la société. La question étant de savoir la proportion de mécontents par rapport à l’ensemble de la population et de localiser les foyers de mécontents, sur le plan régional, de classe ou tribal (car cela joue aussi dans ce pays, où il y a trois "hordes" kazakhes en concurrence traditionnelle).
Et puis il y a dans le nord du pays et à Almaty le facteur Kazakhs vs Russes, d’autant plus que le pouvoir a gonflé à bloc le sentiment ethniciste kazakh depuis 1991 tout en continuant à s’appuyer sur des cadres russes nécessaires.
Et puis il y a le fait que les entreprises énergétiques et les banques au Kazakhstan ne sont qu’en partie en main kazakhes mais qu’il y a une présence dominante des multinationales occidentales et des entreprises chinoises (privées et publiques par ailleurs) qui se font une concurrence ardue.
Dans le passé on a assisté à des mouvements de grèves assez puissants dans les entreprises chinoises organisés par des syndicalistes formés par des groupes trotskystes en Angleterre ...Or, ces syndicalistes limitaient leurs cibles aux entreprises chinoises mais ne touchaient pas les entreprises voisines aux mains des concurrents occidentaux ...alors que les salaires sont identiques dans les entreprises chinoises et les multinationales occidentales !
On a des campagnes xénophobes anti-chinoises et antirusses au Kazakhstan mais, bizarrement, pas anti-anglais ou anti-américains ou anti-français alors qu’ils sont là eux aussi.
Pour ce qui est des troupes de l’OTSC, elles sont pour moitié environ russe, pour un quart biélorussienne et pour le dernier quart de tous les autres États membres.
On dit que l’initiative ne serait pas partie du Kremlin mais de Loukachenko qui aurait contacté Tokaiev puis Poutine pour leur proposer de coordonner leurs réactions. Elles ne sont pas là pour réprimer mais pour sécuriser Baïkonour, les principales entreprises, les aéroports et les bâtiments publics clefs (KGB local ? Ce qui irait en faveur de la thèse que Tokaiev n’est pas sûr de contrôler les ministères de force sans opérer une purge des partisans de Nazarbaiev).
Elles sont là sans doute aussi pour donner aux russophones un sentiment de sécurité. Autrement dit, Tokaiev a remis la sécurité extérieure de l’État aux mains de la Russie/Biélorussie.
La Chine vient d’apporter son soutien verbal ...et l’Afghanistan des talibans aussi dans un message à Tokaiev ...façon de dire "vos terroristes, c’est Daech, pas nous ...alors reconnaissez notre gouvernement et luttons ensemble".
Une alliance Tokaiev-talibans pour combattre les djihadistes, ce serait une première ! ...qui pourrait plaire aux Chinois et aux Russes par la même occasion.
La fin du "front djihadiste" anti-Eurasie et objectivement utile aux USA depuis 1978.
Bref c’est très très très compliqué.
[1] kazakhe et kazakhstanaise, deux notions différentes, nationalité et citoyenneté).