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Israël : la France et les Européens ont-ils des principes et une éthique ?
lundi 19 février 2024 par Jacques Fath
Pourquoi la guerre ? Quel est notre véritable ennemi ? Le capitalisme qui se nourrit de celle-ci comme la nuée de l’orage disait jean Jaurès. Rien a changé depuis. Tant que nous n’abattrons pas ce système injuste, la guerre restera le seul recourt à leurs difficultés. Rappellons pour mémoire que l’impérialisme n’a aucune éthique autre que celle de son profit immédiat. Guerre à la guerre !(JP-ANC)
Israël veut participer à HYDEF, un vaste programme européen de défense antimissile hypersonique. La France et l’UE vont-elles accepter de coopérer sur le plan militaire avec un État suspecté de génocide par la Cour Internationale de Justice ?
L’Union européenne, ses États membres et les groupes industriels de la défense ont lancé, non sans de vives concurrences et rivalités nationales, la mise au point de projets militaires de haute technologie, en particulier ce que l’on appelle des « intercepteurs hypersoniques », c’est à dire des systèmes de défense contre les menaces dites hyper-véloces ou hypersoniques (plus de 5 fois au moins la vitesse du son).
Ces systèmes d’armements très sophistiqués permettent de faire échec à des tirs de missiles hypersoniques en les détruisant en plein vol.
La France est très engagée dans ce type de projets.
En 2022, la Commission européenne a confié, pour l’horizon 2035, la conception d’un programme de cette nature, nommé HYDEF, à un groupement européen couvrant 7 pays, piloté par l’Espagne (groupe SENER) en coopération avec 14 sociétés européennes (Espagne, Allemagne, Belgique, Pologne, République tchèque, Suède, Norvège).
On apprend aujourd’hui qu’Israël aurait proposé son « assistance », c’est à dire de s’inscrire dans la réalisation de ce projet européen. Il est vrai qu’Israël dispose de capacités technologiques, et d’expérience en la matière, comme en témoigne le système de protection aérienne Dôme de fer, réalisé avec une aide américaine, censé protéger Israël contre les frappes de missiles, mais dont l’efficacité est souvent mise en doute du fait d’un manque de transparence sur ses résultats réels.
Évidemment, ces armements posent de multiples questions liées en particulier à leur pertinence stratégique et militaire et à leur coût (le tir d’un seul missile d’interception avec le système Dôme de fer est évalué entre 50 et 62 000 dollars).
Notons aussi au passage l’absence de compétence directe de la Commission européenne en matière de défense. Toutes ces questions doivent être examinées avec soin et faire l’objet des critiques nécessaires. Mais dans le contexte actuel cette proposition israélienne pose immédiatement de très sérieux problèmes.
Premièrement, la question est posée de la légitimité même d’une telle coopération, qu’il s’agisse d’armements de haute technologie ou autre, avec un État dont le comportement politico-militaire à Gaza a été considéré comme potentiellement génocidaire par l’ordonnance de la Cour Internationale de Justice (CIJ) en date du 26 janvier 2024.
Dans son jugement quant à l’action d’Israël à Gaza, la CIJ a souligné, en effet, ce que l’on doit bien appeler une suspicion légitime de génocide. Comment les Européens pourraient-ils accepter une telle coopération ?
Comment pourraient-ils justifier qu’ils sanctionnent la Russie pour sa guerre en Ukraine, tout en s’associant avec Israël dans un vaste projet militaire, alors que ce pays est suspecté de crime de génocide par la Cour Internationale de Justice ?
On quitterait ici le deux poids, deux mesures pour gagner des rives morales et politiques hors de toute mesure.
Deuxièmement, le développement d’armements de très hautes technologies est manifestement issu, en France, de décisions confidentielles, en tous les cas hors de toute expression officielle transparente. La France est engagée dans le développement de ce type d’armes depuis des lustres sans que cela fasse l’objet d’une information véritable et d’un nécessaire débat public portant notamment sur la pertinence de ces armes et sur les responsabilités françaises et européennes dans le contexte international actuel.
Il faudra bien sortir de cette situation antidémocratique. La proposition israélienne, par son caractère provocateur et inacceptable sur le fond, devrait être l’opportunité d’une mise au point sévère et d’une transformation des règles et des pratiques devant être appliquées dans ces domaines comme dans d’autres.
C’est ce qu’exigent un État de droit et la démocratie.
Voir en ligne : https://jacquesfath.international/2...