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Testament du martyr Yahya Sinwar
mercredi 23 octobre 2024 par Yahya Sinwar
Selon le décrets de nos maîtres, on peut supposer que ce document doit entrer dans la catégorie "apologie du terrorisme" ...a vous de juger. En tous cas, c’est le témoignage d’une trajectoire humaine vivante qui, indépendamment de nos options idéologiques, ne peut laisser indifférent les rebelles et les révolutionnaires.(BD-ANC)
Je suis Yahya, fils d’un réfugié qui a transformé l’exil en une patrie temporaire, et le rêve en une bataille éternelle.
En écrivant ces mots, je me remémore chaque instant de ma vie : de mon enfance dans les ruelles, aux longues années d’emprisonnement, et jusqu’à chaque goutte de sang versée sur cette terre.
Je suis né dans le camp de réfugiés de Khan Younès en 1962, à une époque où la Palestine n’était qu’une mémoire déchirée, des cartes oubliées sur les tables des politiciens.
Je suis l’homme dont la vie s’est tissée entre le feu et les cendres, et j’ai compris très tôt que vivre sous l’occupation ne signifie rien d’autre qu’une prison permanente.
J’ai su, dès mon plus jeune âge, que vivre sur cette terre n’était pas ordinaire, et que celui qui y naît doit porter dans son cœur une arme indestructible, et comprendre que le chemin vers la liberté est long.
Mon testament commence ici, avec cet enfant qui a lancé sa première pierre contre l’occupant, et qui a appris que les pierres sont les premiers mots que nous prononçons face à un monde qui reste silencieux devant notre blessure.
J’ai appris dans les rues de Gaza que la valeur d’une personne ne se mesure pas aux années qu’elle a vécues, mais à ce qu’elle offre à sa patrie. Et ainsi fut ma vie : prisons et batailles, douleur et espoir.
Je suis entré en prison pour la première fois en 1988, condamné à perpétuité, mais je n’ai jamais connu la peur.
Dans ces cellules sombres, je voyais à chaque mur une fenêtre vers l’horizon lointain, et dans chaque barreau, une lumière éclairant le chemin vers la liberté.
En prison, j’ai appris que la patience n’est pas seulement une vertu, mais une arme… Une arme amère, comme si l’on buvait la mer goutte à goutte.
Mon testament pour vous : n’ayez pas peur des prisons, elles ne sont qu’une partie de notre long chemin vers la liberté.
La prison m’a appris que la liberté n’est pas simplement un droit volé, mais une idée qui naît de la souffrance et se forge avec la patience. Lorsque j’ai été libéré lors de l’échange “Loyauté des Libres” en 2011, je n’en suis pas sorti comme j’étais ; je suis sorti plus fort, avec la conviction renforcée que ce que nous faisons n’est pas une lutte passagère, mais notre destin que nous porterons jusqu’à la dernière goutte de notre sang.
Mon testament est que vous restiez attachés au fusil, à la dignité qui ne se négocie pas, et au rêve qui ne meurt jamais. L’ennemi veut que nous abandonnions la résistance, que nous transformions notre cause en une négociation sans fin…
Mais je vous dis : ne négociez pas ce qui vous revient de droit. Ils craignent votre persévérance plus qu’ils ne craignent vos armes. La résistance n’est pas seulement une arme que nous portons, mais elle est notre amour pour la Palestine à chaque souffle que nous prenons, c’est notre volonté de rester, malgré le siège et l’agression.
Mon testament est que vous restiez fidèles au sang des martyrs, à ceux qui sont partis et nous ont laissé ce chemin parsemé d’épines. Ce sont eux qui ont pavé pour nous la voie de la liberté avec leur sang, alors ne gaspillez pas ces sacrifices dans les calculs des politiciens et les jeux de la diplomatie.
Nous sommes ici pour achever ce que les premiers ont commencé, et nous ne dévierons pas de ce chemin, quel qu’en soit le prix. Gaza a toujours été et restera la capitale de la résistance, le cœur de la Palestine qui ne cesse de battre, même lorsque la terre nous semble trop étroite.
Lorsque j’ai pris la tête du Hamas à Gaza en 2017, ce n’était pas simplement un transfert de pouvoir, mais la continuité d’une résistance qui a commencé avec des pierres et s’est poursuivie avec des fusils. Chaque jour, je ressentais la souffrance de mon peuple sous le siège, et je savais que chaque pas que nous faisions vers la liberté avait un coût. Mais je vous dis : le coût de la capitulation est bien plus grand. C’est pourquoi, accrochez-vous à la terre comme une racine s’accroche au sol, aucune tempête ne peut déraciner un peuple qui a décidé de vivre.
Dans la bataille de l’Ouragan d’Al-Aqsa, je n’étais pas le chef d’un groupe ou d’un mouvement, mais la voix de chaque Palestinien rêvant de liberté. Ma foi m’a guidé, sachant que la résistance n’est pas seulement un choix, mais un devoir. Je voulais que cette bataille soit une nouvelle page dans le livre de la lutte palestinienne, où les factions s’unissent et où tout le monde se tient dans le même camp, contre un ennemi qui n’a jamais distingué entre un enfant et un vieillard, ou entre une pierre et un arbre.
L’Ouragan d’Al-Aqsa était une bataille des âmes avant celle des corps, et de la volonté avant celle des armes.
Ce que je laisse derrière moi n’est pas un héritage personnel, mais un héritage collectif, pour chaque Palestinien qui a rêvé de liberté, pour chaque mère qui a porté son fils martyr sur ses épaules, pour chaque père qui a pleuré sa fille fauchée par une balle traîtresse.
Mon dernier testament est de toujours vous rappeler que la résistance n’est pas une futilité, et qu’elle n’est pas seulement une balle tirée, mais une vie vécue avec honneur et dignité. La prison et le siège m’ont appris que la bataille est longue, et que le chemin est ardu, mais j’ai aussi appris que les peuples qui refusent de se rendre créent leurs miracles de leurs propres mains.
Ne comptez pas sur le monde pour vous rendre justice, car j’ai vécu et vu comment le monde reste silencieux face à notre souffrance. Ne cherchez pas la justice, soyez vous-mêmes la justice. Portez le rêve de la Palestine dans vos cœurs, et faites de chaque blessure une arme, et de chaque larme une source d’espoir.
Voici mon testament : ne déposez pas vos armes, ne jetez pas vos pierres, n’oubliez pas vos martyrs, et ne négociez pas un rêve qui est votre droit.
Nous sommes ici pour rester, sur notre terre, dans nos cœurs, et dans l’avenir de nos enfants.
Je vous lègue la Palestine, cette terre que j’ai aimée jusqu’à la mort, et le rêve que j’ai porté sur mes épaules comme une montagne qui ne ploie pas.
Si je tombe, ne tombez pas avec moi, mais portez en mon nom un étendard qui n’est jamais tombé, et faites de mon sang un pont pour la génération qui naîtra de nos cendres, plus forte. N’oubliez pas que la patrie n’est pas un conte qu’on raconte, mais une réalité vécue, et que dans chaque martyr qui naît de cette terre, mille résistants sont engendrés.
Si l’ouragan revient et que je ne suis plus parmi vous, sachez que j’étais la première goutte dans les vagues de la liberté, et que j’ai vécu pour vous voir continuer la marche.
Soyez une épine dans leur gorge, un ouragan qui ne connaît pas le recul, et qui ne s’arrêtera que lorsque le monde reconnaîtra que nous sommes les détenteurs du droit, et que nous ne sommes pas que des chiffres dans les bulletins d’information.