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Cette nouvelle crise de la dette qui menace l’Afrique en silence
vendredi 6 janvier 2023 par Afrique XXI
Le 19 décembre dernier, le Ghana a pris de court ses créanciers en annonçant la suspension du remboursement de sa dette extérieure. La seconde économie d’Afrique de l’Ouest n’avait guère le choix, elle traverse une des crises économiques les plus graves de son histoire. Sa monnaie, le cedi, a perdu en quelques mois la moitié de sa valeur face au dollar et l’inflation y dépasse 50 %. Accra paie cash les conséquences de la crise du Covid – en 2020, son déficit public atteignait 15,2 % du PIB –, de la guerre en Ukraine et de la remontée des taux d’intérêt initiée par les banques centrales occidentales.
Pourtant, le défaut de paiement ghanéen est tout sauf une surprise : le FMI considère le pays comme à risque élevé de surendettement depuis le milieu des années 2010 ! La dette publique a explosé, dépassant les 80 % du PIB. En février dernier, l’agence Moody’s avait dégradé la notation du pays en estimant que le paiement des intérêts absorberait bientôt plus de la moitié des recettes fiscales.
La situation est d’autant plus difficile que la dette extérieure ghanéenne est, pour moitié, contractée sur les marchés financiers. Les titres sont dispersés entre les mains de milliers de créanciers privés, ce qui rend très aléatoire une restructuration négociée. Les fonds d’investissement nord-américains BlackRock ou Franklin Ressources par exemple sont devenus les principaux créanciers du Ghana, certes derrière la Banque mondiale, mais au même niveau que l’Etat chinois et très loin devant la France, l’Allemagne ou les États-Unis.
Sur les réseaux sociaux, quelques zélateurs du franc CFA ont semblé se réjouir des déboires ghanéens. Il est vrai que, dans la période, l’arrimage à l’euro protège d’un effondrement monétaire et limite les poussées inflationnistes.
Mais le franc CFA ne protège ni du choc économique post-Covid, ni d’un endettement excessif. Au contraire, le poids de la dette extérieur est, en zone CFA, structurellement plus élevé que la moyenne africaine. Parmi ses membres, la République du Congo et le Tchad ont basculé en défaut de paiement bien avant le Ghana. Et le Cameroun, les Comores, la Guinée Bissau ou la République centrafricaine sont également classés par le FMI comme à risque élevé de surendettement.
A qui le tour après le Ghana ?
Les organisations de la société civile et les chercheur.es alertent depuis de nombreuses années sur le niveau alarmant atteint par l’endettement obligataire de nombreux pays africains. Le risque d’une faillite en chaîne, comme au début des années 1980, est bien réel. Mais la communauté internationale ne semble toujours pas en prendre la mesure.