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À propos de l’attaque surprise des palestiniens
lundi 9 octobre 2023 par Philippe Arnaud,
L’attaque-surprise du Hamas contre Israël, au matin du 7 octobre, a donné lieu à de multiples rapprochements :
1. On l’a comparée au début de la guerre du Kippour, qui fut marquée, également, par une attaque-surprise des armées égyptienne et syrienne, pratiquement 50 ans jour pour jour, avant l’attaque du Hamas. (En fait la guerre du Kippour commença le 6 octobre, mais, à 50 ans de distance, on peut considérer, symboliquement, que la coïncidence temporelle est parfaite - Comme, en d’autres temps, la campagne de Russie de Napoléon débuta le 24 juin 1812 et l’opération Barbarossa de Hitler le 22 juin 1941, c’est-à-dire pratiquement le même jour, à 129 ans d’intervalle). Et, dans les deux cas, nul ne croyait les belligérants arabes (égyptiens et syriens en 1973, palestiniens en 2023) capables de monter une action de si grande envergure sans être repérés.
2. On l’a comparée aussi aux attentats du 11 septembre 2001, à New York et à Washington, notamment pour son caractère terroriste affirmé (les commandos du Hamas semblent avoir visé délibérément des civils dans une rave-party, tué des occupants de plusieurs kibboutz, assassiné plusieurs automobilistes circulant sur une autoroute, et avoir pris un grand nombre d’otages, civils et militaires, et les avoir emmenés prisonniers dans la bande de Gaza - sans doute pour s’en servir comme de monnaie d’échange).
Il est néanmoins étonnant que les commentateurs n’aient pas opéré de parallèle avec une attaque-surprise qui prit aussi totalement au dépourvu les armées assaillies, et qui n’est pas sans similitudes avec l’attaque du Hamas du 7 octobre : l’offensive du Têt, lancée le 30 janvier 1968, par le FLN sud-vietnamien, sur plus de 100 villes, bases militaires et aéroports, à la fois contre l’armée américaine et contre l’armée sud-vietnamienne. Cette offensive prit complètement au dépourvu l’armée américaine et l’armée sud-vietnamienne.
Comme le FLN sud-vietnamien en 1968, le Hamas a attaqué à de très nombreux endroits, à la fois par des commandos infiltrés à pied, ou en motocyclette, ou en parapentes à moteur, ou par bateau. Et a expédié des milliers de roquettes sur Israël, à courte, moyenne et longue distance - un peu comme les soldats du FLN sud-vietnamiens pilonnèrent les bases américaines, par exemple à Khe Sanh, près du 17e parallèle. De même, comme les combattants du FLN avaient investi l’ambassade des États-Unis à Saïgon, les commandos du Hamas ont investi (plus modestement) un commissariat de police dans la ville israélienne de Sdérot.
Militairement, l’offensive du Têt fut un échec énorme (les troupes du FLN subirent une saignée). Ce fut aussi un échec politique car la population du Sud-Vietnam ne se rallia pas au FLN et, globalement, l’armée sud-vietnamienne ne se débanda pas et ne fit pas non plus défection au profit du FLN. Mais, au États-Unis, l’effet fut bien plus considérable, puisqu’il accrut l’opposition à la guerre, les manifestations pacifistes, et incita le président Johnson à ne pas se représenter à la présidentielle - et qu’il fraya la voie à la victoire définitive des Vietnamiens, en 1975.
Comparaison n’est pas raison, et il est difficile de dire quelles seront les conséquences de cette attaque-surprise. Comme au Vietnam en 1968, il est très probable que, compte tenu de la disproportion des forces, l’armée israélienne écrasera les forces du Hamas - mais les répercussions seront probablement d’ordre politique et géopolitique à long terme.