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Pourquoi Israël n’a en réalité aucun “droit d’exister”
jeudi 6 mars 2025 par Jeremy R. Hammond

Quel mal y aurait-il à invalider le régime raciste qui viole sans répit droit international et droits des Palestiniens ? Quiconque possède une once d’honnêteté et d’intégrité morale répondra : aucun.
Les apologistes des crimes d’Israël contre les Palestiniens affirment que l’État a le “droit d’exister” afin de légitimer le nettoyage ethnique de la Palestine.
Les sionistes, qui s’érigent en défenseurs des crimes d’Israël contre le peuple palestinien, accusent fréquemment leurs détracteurs de tenter de “délégitimer” l’État juif autoproclamé. Israël, rétorquent-ils, a le “droit d’exister”.
Mais ils se trompent.
Il ne s’agit pas de pointer du doigt Israël. Le “droit à l’existence” d’un État n’existe pas, point final. Aucun droit de ce type n’est reconnu par le droit international. Logiquement, il ne devrait d’ailleurs pas exister. Le concept même est absurde. Ce sont les individus, et non des entités politiques abstraites, dont les droits sont garantis.
Les droits individuels peuvent également être exercés collectivement, mais sans porter préjudice aux droits des individus. Le droit applicable dans ce contexte est plutôt le droit à l’autodétermination, qui désigne le droit d’un peuple à exercer collectivement ses droits individuels par le biais de l’autonomie politique. L’exercice collectif de ce droit ne peut violer l’exercice individuel de celui-ci.
Le seul et unique objectif légitime d’un gouvernement est de protéger les droits individuels, et un gouvernement n’a aucune légitimité sans le consentement des gouvernés. Ce n’est que dans ce sens que le droit à l’autodétermination peut être exercé collectivement, par un peuple qui choisit lui-même comment il doit être gouverné et consent à cette gouvernance.
Le droit à l’autodétermination, contrairement au concept absurde du “droit à l’existence” d’un État, est reconnu en droit international. C’est un droit expressément garanti, par exemple, par la Charte des Nations unies, à laquelle l’État d’Israël est partie.
Le cadre pertinent de discussion est donc le droit à l’autodétermination, et c’est précisément pour obscurcir cette vérité que la propagande affirme fréquemment qu’Israël a un “droit à l’existence”. Les apologistes d’Israël se doivent de déplacer ainsi le cadre de discussion car, dans l’optique du droit à l’autodétermination, c’est évidemment Israël qui rejette les droits des Palestiniens et non l’inverse.
Et le rejet des Palestiniens par Israël ne se manifeste pas seulement dans l’occupation permanente du territoire palestinien. Ce déni des droits des Palestiniens s’est également manifesté dans les moyens mêmes par lesquels Israël a été créé.
On croit souvent qu’Israël a été fondé par le biais d’un processus politique légitime.
C’est faux.
Ce mythe repose sur l’idée que la célèbre résolution de l’Assemblée générale des Nations unies sur le “plan de partage” (résolution 181 du 29 novembre 1947) a légalement divisé la Palestine ou a conféré une autorité légale aux dirigeants sionistes pour leur déclaration unilatérale de l’existence d’Israël le 14 mai 1948.
En effet, dans cette même déclaration, document fondateur d’Israël, les dirigeants sionistes se sont appuyés sur la résolution 181 pour revendiquer leur autorité légale. La vérité est cependant que la résolution 181 n’a rien fait de tel. L’Assemblée générale n’avait pas le pouvoir de partager la Palestine contre la volonté de la majorité de ses habitants. Elle ne le prétendait pas non plus.
Au contraire, l’Assemblée a simplement recommandé la partition de la Palestine en États juif et arabe distincts, qui ne pourraient être légalement mis en place qu’avec l’accord des deux peuples. L’Assemblée a transmis la question au Conseil de sécurité, où le plan a été abandonné, les Nations unies ayant explicitement reconnu qu’elles n’avaient pas le pouvoir de mettre en œuvre une telle partition.
La déclaration unilatérale des sionistes est souvent décrite comme une “déclaration d’indépendance”. Mais ce n’était pas le cas. Une déclaration d’indépendance suppose que le peuple qui déclare son indépendance est souverain sur le territoire sur lequel il souhaite exercer son droit à l’autodétermination. Mais les sionistes n’étaient pas souverains sur les terres qui sont devenues le territoire de l’État d’Israël.
Au contraire, lorsqu’ils ont déclaré l’existence d’Israël, les Juifs possédaient moins de 7 % des terres de Palestine. Les Arabes possédaient plus de terres que les Juifs dans tous les districts de Palestine. Les Arabes constituaient également une majorité numérique en Palestine. Malgré l’immigration massive, les Juifs restaient une minorité représentant environ un tiers de la population.
Même sur le territoire proposé par l’ONU pour l’État juif, une fois la population bédouine prise en compte, les Arabes formaient toujours la majorité. Et sur ce territoire, les Arabes possédaient toujours plus de terres que les Juifs.
En d’autres termes, les dirigeants sionistes, qui ont fini par s’emparer de ce territoire par la guerre, ne pouvaient légitimement revendiquer sa souveraineté.
La conquête d’un territoire par la guerre est strictement interdite par le droit international.
Loin d’avoir été créé par un processus politique légitime, Israël a été fondé dans la violence. Les sionistes se sont emparés de la majeure partie du territoire de leur État par le biais d’un nettoyage ethnique de la majeure partie de la population arabe, soit plus de 700 000 personnes, chassées de leurs foyers en Palestine. Des centaines de villages arabes ont été littéralement rayés de la carte.
Ainsi, lorsque les sionistes affirment qu’Israël a le “droit d’exister”, ils disent en réalité qu’ils ont le “droit” de procéder à un nettoyage ethnique de la Palestine afin d’établir leur “État juif”.
Évidemment, un tel droit n’existe pas. Au contraire, une fois de plus, en vertu du droit international, le nettoyage ethnique est reconnu comme un crime contre l’humanité.
Les sionistes accusent les détracteurs des crimes d’Israël contre les Palestiniens de chercher à “délégitimer l’État juif”, mais ce qui compte, c’est que la déclaration unilatérale des sionistes du 14 mai 1948 ne repose sur aucune légitimité. Car le crime de nettoyage ethnique ne peut être ni justifié ni légitimé.
L’accusation portée contre les détracteurs d’Israël vise en réalité les apologistes d’Israël qui tentent de priver les Palestiniens de leur droit à l’autodétermination et de priver les réfugiés de guerre de leur droit internationalement reconnu à retourner dans leur patrie.
Indépendamment du caractère illégitime de l’établissement d’Israël, il fait partie de la réalité actuelle. Cependant, exiger des Palestiniens qu’ils reconnaissent le “droit” d’Israël non seulement à exister, mais à exister “en tant qu’État juif”, revient à leur demander de renoncer à leurs droits et d’accepter la légalité de la déclaration unilatérale des sionistes et du nettoyage ethnique de la Palestine.
Et voilà pourquoi la paix n’a pas été possible. Il n’y aura pas de paix tant que les droits des Palestiniens ne seront pas reconnus et respectés. Le problème des sionistes réside en ce que l’exercice des droits des Palestiniens signifierait la fin de l’existence d’Israël en tant qu’“État juif”.
Mais quel mal y aurait-il à mettre fin à un régime fondamentalement raciste qui viole perpétuellement le droit international et les droits de l’homme des Palestiniens ?
Quel mal y aurait-il à le remplacer par un gouvernement qui respecte l’égalité des droits de tous les habitants du territoire sur lequel il exerce sa souveraineté politique et gouverne avec le consentement des gouvernés ?
Pour quiconque possède un minimum d’honnêteté et d’intégrité morale, la réponse claire à ces deux questions est : absolument aucun.
C’est donc dans cette optique que nous devons orienter nos efforts collectifs, en commençant par bien comprendre la véritable nature du conflit et en aidant tous ceux qui font preuve d’intégrité, et ont été abusés par les mensonges et la propagande qui perpétuent la violence et l’injustice depuis si longtemps, à enfin ouvrir les yeux.
Photo : Réfugiés palestiniens fuyant leurs foyers en 1948, couverture de “Les origines du problème des réfugiés palestiniens” de Benny Morris (Domaine public)
Voir en ligne : https://ssofidelis.substack.com/p/p...